Prévisions économiques trimestrielles
S’adapter à la nouvelle normalité commerciale
date publiée: 18 septembre 2025
Faits saillants
- Malgré tous les rebondissements dans la politique commerciale américaine, nos prévisions pour l’économie mondiale demeurent globalement les mêmes qu’en juin.
- Il en va de même pour celles de l’économie américaine, du moins en apparence. Les consommateurs ont réduit leurs dépenses alors que le marché du travail a ralenti, mais cette tendance a été compensée par de solides investissements des entreprises. On s’attend à ce que la Réserve fédérale des États-Unis (la Fed) réduise encore les taux d’intérêt pour soutenir le marché du travail, qui a ralenti plus que prévu.
- Les exportations canadiennes ont été durement touchées par les droits de douane américains, mais les dépenses de consommation ont montré une résilience surprenante, soutenue en partie par la reprise des achats d’automobiles et malgré les droits de douane. Les baisses de taux d’intérêt ont contribué à un regain d’activité dans le secteur de l’habitation, mais ne constituent pas une panacée aux difficultés structurelles qui continueront de peser sur l’économie canadienne.

Les économistes souffrent encore des contrecoups des rebondissements successifs dans la politique commerciale américaine. Pourtant, malgré toutes ces tergiversations, nos prévisions pour l’économie mondiale demeurent globalement les mêmes qu’en juin. La croissance mondiale devrait atteindre 3,1 % cette année, avec un léger ralentissement prévu pour 2026. Dans la zone euro, le PIB a augmenté à un rythme annualisé de 0,4 % au deuxième trimestre, légèrement au-dessus des attentes, mais nettement plus lent que le rythme de 2,4 % enregistré au premier trimestre. La Chine a enregistré une croissance de 5,2 % sur 12 mois au deuxième trimestre, , un résultat supérieur aux prévisions, bien que la faiblesse de la croissance du crédit et les tensions persistantes dans le secteur de l’immobilier laissent entrevoir un ralentissement au deuxième semestre. L’économie japonaise a enregistré une croissance à un taux annualisé de 1,0 %, ce qui a surpassé les attentes.
Sur le plan du commerce, les risques se sont atténués pour l’instant : les États-Unis ont plafonné à 15 % les droits de douane imposés à l’Union européenne en juillet, ont prolongé leur trêve de 90 jours avec la Chine et le Mexique en août, et ont conclu avec le Japon un accord limité préservant l’accès au marché. Toutefois, des frictions persistent, notamment avec l’imposition par la Chine de nouveaux droits sur les produits agricoles européens. De plus, une grande incertitude plane quant à la direction de la politique commerciale une fois que ces trêves temporaires auront expiré et advenant que la Cour suprême des États-Unis déclare illégaux les droits de douane imposés en vertu de l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA). L’anticipation précédant la date de mise en œuvre des droits de douane réciproques fixée par le président Trump, initialement prévue en juillet, mais reportée par la suite, a entraîné une augmentation de la production industrielle et une accumulation des stocks. Cela entraînera probablement un rythme de croissance irrégulier tant dans les marchés développés que dans les marchés émergents, selon leur degré d’exposition commerciale. Il en résulte une économie mondiale qui continue de progresser en moyenne, mais à un rythme peu impressionnant et qui diverge d’un pays à l’autre. Ce rythme modeste est soutenu par la demande et les services intérieurs, mais est limité par la faiblesse du commerce des biens et l’incertitude liée aux politiques.
Ralentissement de l’économie américaine et nouvelles baisses de taux à venir
Dans l’ensemble, le contexte économique pour l’économie américaine reste le même que dans nos prévisions de juin, avec une croissance prévue de 1,8 % cette année. Les politiques commerciales fluctuantes demeurent la principale source d’incertitude dans nos prévisions et représentent un risque baissier pour l’économie américaine. Compte tenu des récents accords commerciaux conclus avec l’Union européenne et le Japon, nous avons revu à la hausse notre hypothèse concernant le taux tarifaire effectif sur les importations à moyen terme (graphique 1). Les droits de douane plus élevés ont contribué à une légère révision à la baisse de la croissance prévue pour 2026, désormais attendue comme stable à 1,8 %, soit quelques dixièmes de pourcentage de moins que les prévisions de juin, bien qu’une réponse plus importante que prévu aux réductions fiscales découlant de la loi One Big Beautiful Bill Act constitue un risque haussier.
Les changements apportés aux politiques tarifaires ont contribué à la volatilité de la croissance au premier semestre de l’année, même si la demande intérieure privée a mieux résisté que prévu, grâce à la hausse importante des investissements des entreprises. Les dépenses des entreprises en matériel et en produits de propriété intellectuelle, notamment en logiciels, ont été très solides. Certains de ces investissements ont probablement été anticipés pour éviter des hausses de prix liées aux droits de douane. L’augmentation significative des investissements dans les ordinateurs, les autres appareils électroniques et les logiciels pourrait aussi refléter une hausse des dépenses en outils d’intelligence artificielle. La hausse continue des importations d’ordinateurs et d’appareils électroniques en juillet suggèrent que les dépenses en matériel pourraient se poursuivre au troisième trimestre.

Le marché de la consommation n’a pas aussi bien résisté. La croissance des dépenses de consommation a été réduite de plus de moitié au cours du premier semestre de l’année, atteignant un rythme de 1,6 %, les ménages ayant réduit leurs dépenses en services discrétionnaires en raison notamment d’un marché du travail en perte de vitesse. Ces difficultés devraient limiter les dépenses de consommation en deçà de 2 % au cours des quatre prochains trimestres (graphique 2), avant que la baisse des taux d’intérêt, la baisse de l’inflation, des réductions d’impôt et une amélioration du marché de l’emploi ne fassent grimper les dépenses à un rythme d’environ 2 % vers la fin de 2026.
Le ralentissement du marché du travail a accru le risque de récession et a attiré l’attention de la Fed. Le FOMC a recommencé à réduire les taux d’intérêt en septembre, et nous anticipons deux autres baisses cette année. Même si l’inflation devrait rester au-dessus de la cible de 2 % de la Fed pendant encore quelque temps, la révision des données a révélé un ralentissement plus prononcé que prévu de l’embauche, ce qui donne à penser que le taux des fonds fédéraux à 4,5 % était trop restrictif pour favoriser le plein emploi. Nous prévoyons un nouvel affaiblissement de l’emploi, entraînant des pertes nettes d’emplois au quatrième trimestre et une hausse du taux de chômage à 4,4 %. Nous nous attendons à ce que le FOMC continue de réduire les taux d’intérêt l’an prochain, pour atteindre un niveau d’équilibre à 3,25 %, inchangé par rapport à notre prévision de juin. Nos prévisions de fin d’année pour les rendements des obligations du Trésor à plus long terme ont été légèrement revues à la baisse, reflétant une conviction accrue des marchés financiers que la Fed devra ramener les taux à un niveau inférieur au taux actuel, jugé restrictif.
L’économie canadienne malmenée par la guerre commerciale américaine
La croissance économique du Canada devrait ralentir à un rythme de 1,2 % cette année, les droits de douane élevés imposés par les États-Unis ayant considérablement affecté la demande pour de nombreuses exportations canadiennes. Ce chiffre est toutefois biaisé à la hausse par un fort effet de report provenant de 2024, et la croissance ne devrait être que de 0,6 % d’un quatrième trimestre à l’autre. Le pays a enregistré sa plus forte baisse trimestrielle des exportations en dehors de la crise financière mondiale de 2009 et de la pandémie de COVID-19, entraînant une contraction de 1,6 % de la production au deuxième trimestre, ce qui correspond globalement à nos prévisions et à celles de la Banque du Canada.
Nos perspectives concernant les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis ont changé : nous ne supposons plus qu’un accord commercial sera conclu entre les deux pays cette année et nous supposons que les droits de douane actuels ainsi que les exemptions resteront en place durant toute la période de prévision. Par conséquent, aucun redressement substantiel des exportations ne semble se profiler. La baisse de la demande pour les exportations pèse également sur les perspectives d’investissement des entreprises. Nous prévoyons que l’investissement non résidentiel se contractera au second semestre de l’année, ce qui aura des répercussions sur les besoins d’embauche des entreprises. Par conséquent, d’autres pertes d’emplois modérées sont à prévoir au cours des prochains trimestres, ce qui pourrait faire grimper le taux de chômage jusqu’à un sommet cyclique de 7,3 %.

Malgré ces difficultés, le deuxième trimestre a connu des développements positifs, avec une forte reprise de 3,5 % de la demande intérieure (graphique 3) grâce à des dépenses de consommation robustes et à un regain des investissements dans le secteur de l’habitation. Initialement, les dépenses de consommation et le marché de l’habitation avaient ralenti brutalement sous le choc des menaces commerciales américaines, mais les deux ont rebondi au deuxième trimestre, stimulés par l’accélération des achats de véhicules et de l’augmentation des dépenses liées au tourisme des Canadiens et des visiteurs. Cependant, ces gains devraient être temporaires. Les données mensuelles sur les ventes de véhicules laissent entrevoir un repli au troisième trimestre, et une poursuite de la hausse du tourisme intérieur semble peu probable. Les dépenses de consommation devraient rester faibles, en raison de l’assouplissement des paramètres fondamentaux du marché du travail.
L’investissement résidentiel constitue une lueur d’espoir dans les prévisions de cette année. La croissance a été révisée à la hausse, en raison de la réaction du secteur de l’habitation aux baisses de taux précédentes (et probablement à venir) de la Banque du Canada et de l’activité de construction plus soutenue portée par les logements locatifs, grâce à des programmes de financement gouvernementaux favorables. Néanmoins, la contribution à long terme de ce secteur à la croissance globale restera limitée par des problèmes d’abordabilité persistants et un ralentissement de la croissance démographique. De plus, les marchés ne vont pas tous dans la même direction. Par exemple, le marché de la région du Grand Toronto est actuellement plongé dans une crise importante en raison d’une surabondance de l’offre de copropriétés.
L’inflation devrait demeurer relativement élevée à court terme, conformément à nos projections précédentes. Nous maintenons notre prévision d’une nouvelle baisse de taux par la Banque du Canada, ce qui porterait le taux du financement à un jour à 2,25 %. Ce contexte de baisse de taux, alors que le Canada s’adapte à sa nouvelle « normalité » commerciale.
De plus amples renseignements sur les plans financiers du gouvernement libéral seront dévoilés dans le prochain budget fédéral. Les dépenses fédérales globales devraient continuer à soutenir la croissance; cependant, nous attendons plus de précisions sur la réduction des coûts découlant de l’examen des dépenses, sur l’envergure et la portée du soutien aux grands « projets d’intérêt national » et sur l’échéancier des nouveaux engagements en matière de défense. Ces projets d’infrastructures et de défense requièrent généralement des délais de mise en œuvre prolongés, et selon la rapidité des dépenses, nos prévisions, qui tablent sur une amélioration progressive de la croissance du PIB réel pour atteindre un peu moins de 2 % d’ici 2027, pourraient être revues à la hausse. Il convient également de garder un œil sur les consommateurs, car la reprise du marché canadien de l’habitation est connue pour stimuler la croissance des dépenses. En revanche, un nouvel effritement des relations commerciales Canada-États-Unis et la possibilité d’une détérioration des conditions financières mondiales représentent deux risques de baisse.
Tableaux de prévisions et recherche
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