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date publiée: 21 février 2024

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L’inflation dans les économies avancées a fait des progrès significatifs au cours des derniers mois, ce qui a permis aux banques centrales de délaisser leurs avertissements de hausses potentielles des taux d’intérêt au profit d’un dialogue sur le moment propice aux réductions. Sur le plan économique, les États-Unis continuent d’afficher un rendement nettement supérieur à celui des autres pays. Malgré les risques géopolitiques et les coûts d’emprunt élevés, l’économie américaine continue d’impressionner, soutenue par une productivité remarquable. Cette situation contraste avec celle d’autres pays où la croissance a nettement ralenti. Le Canada ne fait pas exception à cette règle, mais l’inflation intérieure n’a pas autant capitulé que dans d’autres régions, ce qui constitue un défi pour la Banque du Canada (BdC). Nous explorons ces thèmes dans notre plus récente liste de questions, tout en abordant d’autres sujets tels que les risques persistants liés à l’immobilier commercial, le fort taux d’endettement des consommateurs canadiens et la reprise de la demande de logements de part et d’autre de la frontière.

Q1. Quel est l’impact des risques géopolitiques sur la croissance mondiale, les risques liés à l’inflation et les prix des produits de base?  

Le graphique 1 montre les frais de transport d’un conteneur de 40 pieds carrés de la Chine vers l’Europe, de la Chine vers la côte ouest des États-Unis ainsi qu’un indice de référence mondial. Le graphique montre que les prix ont augmenté pour tous les itinéraires depuis l’automne 2023. Toutefois, les augmentations de prix totales restent bien inférieures à celles observées pendant la pandémie et le coût total du transport reste bien en deçà des sommets.

L’escalade des tensions entre Israël et le Hamas et les régions avoisinantes continue de dévier les navires du canal de Suez vers le cap de Bonne-Espérance afin d’atténuer le risque d’attaques. Depuis octobre, ce détournement a multiplié par près de quatre les taux de fret des conteneurs entre la Chine et l’Europe, tout en doublant les frais d’expédition de la Chine vers les États-Unis (graphique 1).

Cela signifie que les chaînes d’approvisionnement recommencent à s’allonger et que des pressions sur les prix se font sentir. Toutefois, l’ampleur du choc lié au transport ne représente toujours qu’une fraction des perturbations observées pendant la pandémie de COVID-19. Cette fois-ci, une contre-influence partielle des forces déflationnistes en cours dans les usines chinoises limite la capacité des producteurs à répercuter de nouvelles hausses de prix. Autrement dit, les forces désinflationnistes parmi les biens qui ont profité aux pays avancés au cours des derniers mois pourraient bientôt être restreintes dans les mesures de l’indice des prix à la consommation (IPC). Cela étant, l’influence de la Chine contribue également à limiter la mesure dans laquelle un facteur favorable peut alimenter les forces inflationnistes à l’échelle mondiale.

De plus, les prix du pétrole ont généralement fait fi du risque de perturbation de l’offre dans un contexte de turbulences géopolitiques. Les prix du West Texas Intermediate (WTI) ont oscillé entre 70 $ et 75 $ le baril durant la majeure partie des deux derniers mois, ce qui laisse supposer que la prime de risque intégrée aux prix est minime. Cela dit, si les événements devaient se traduire par un retrait physique de l’offre du marché, une hausse des prix du pétrole serait inévitable. Au cours des prochains mois, les prix devraient principalement être dictés par les paramètres fondamentaux. Pour ce qui est des perspectives, les facteurs clés comprennent les attentes d’une forte demande, l’ampleur du ralentissement de la production de gaz de schiste aux États-Unis et le respect par l’OPEP+ des réductions volontaires de la production. Selon nos prévisions d’inflation, les prix du pétrole devraient remonter autour de 80 $ le baril au cours du second semestre de l’année.

Pour les métaux industriels, les perspectives dépendent de la demande, en particulier de celle de la Chine. Les nouvelles mesures de relance visant à accroître les investissements dans les infrastructures et le secteur de la fabrication pourraient stimuler les prix, mais le ralentissement général de la production industrielle et du secteur de la fabrication devrait limiter la hausse. Malgré la baisse de la demande en 2023, les stocks de métaux essentiels demeurent à des creux historiques, ce qui contribue à maintenir les prix à un niveau plancher.

Par ailleurs, les tensions entre la Chine et les États-Unis se sont apaisées après le sommet entre Joe Biden et Xi Jinping qui s’est tenu en novembre dernier, atténuant ainsi certains des risques géopolitiques qui pèsent sur l’économie. Dans l’ensemble, l’économie mondiale fait un peu mieux que prévu dans nos perspectives du mois de décembre, puisque la croissance du PIB mondial en 2024 devrait s’établir à 2,8 % (contre 2,6 % en décembre). Les principaux risques seraient que les mesures de relance budgétaires de la Chine ne produisent pas l’effet escompté sur la demande ou que l’économie américaine montre finalement des signes d’essoufflement sous le poids des taux d’intérêt élevés.

Q2. Comment expliquer les disparités en matière d’inflation entre les États-Unis, le Canada et la zone euro?    

Le graphique 2 illustre la variation trimestrielle en pourcentage des prix des biens et services de base aux États-Unis, au Canada et dans la zone euro. Le graphique montre que les prix des services de base au Canada et aux États-Unis continuent d’augmenter à un taux de plus de 5 % (en taux annualisé), tandis que les augmentations pour la zone euro sont de 2,6 %. Du côté des biens, les prix des biens de base aux États-Unis sont en nette déflation, tandis que les prix des biens dans la zone euro continuent de grimper à 1,2 %.

En décembre, la variation annuelle de l’IPC était de 3,1 % aux États-Unis, et  2,9% au Canada, et de 2,8 % dans la zone euro. Toutefois, ces données annuelles masquent des disparités importantes. Le momentum des hausses de prix s’est dissipé en Europe, mais le même degré de décélération n’a pas encore été observé en Amérique du Nord. 

Dans la zone euro, le taux d’inflation des biens et des services a considérablement baissé. L’économie est au point mort depuis le troisième trimestre de 2022 (croissance du PIB : +0,04 %). La dynamique économique traditionnelle vise à rééquilibrer l’offre et la demande ainsi qu’à rétablir la stabilité des prix. Par conséquent, la croissance des prix au quatrième trimestre a déjà diminué pour s’établir à environ 2 % (en taux annualisé), tant pour les biens que pour les services (graphique 2). 

On ne peut en dire autant des États-Unis et du Canada. Bien que la croissance économique du Canada se soit progressivement évaporée, la pénurie de logements, qui sévit depuis des décennies, commence à se faire sentir. L’inflation de l’IPC, à l’exclusion des coûts liés au logement (loyer, frais d’intérêts hypothécaires et coûts de remplacement), est déjà revenue à 1,8 % sur 12 mois et s’abaisse de 0,6 % (en taux annualisé) chaque trimestre. Si l’on exclut les mêmes facteurs liés au logement de l’IPC de base classique (hors alimentation et énergie), celui-ci n’a enregistré qu’une maigre progression de 0,1 % (en taux annualisé) au cours du dernier trimestre de 2023! Le tableau qui se dessine est celui d’une économie dont les capacités inutilisées s’accumulent, à l’instar de la zone euro. Toutefois, les différences dans la méthode de calcul de l’IPC au Canada provoquent une plus grande distorsion des coûts liés au logement, lesquels, combinés à une grave pénurie d’offre sur le marché du logement, soutiendront l’inflation globale pour quelque temps encore. C’est la raison pour laquelle nous avons détaillé les risques inhérents à des taux trop élevés pendant trop longtemps dans un récent rapport

Enfin, venons-en aux États-Unis, dont la résilience de l’économie semble défier toutes les lois de la physique, entretenant ainsi l’espoir d’une désinflation immaculée. L’inflation des services s’est montrée moins coopérative. Elle continue de faire bonne figure, dépassant 4 % sur une base trimestrielle. Contrairement au Canada, cette situation n’a rien à voir avec le logement. Si l’on exclut les effets des loyers et de l’accession à la propriété, on constate une hausse trimestrielle des prix de 5,5 % (en taux annualisé) jusqu’en janvier. Les États-Unis se distinguent également par la nette déflation des biens de base : en janvier, les prix ont baissé de 1,9 % (en taux annualisé) sur une base trimestrielle continue. Ces chiffres n’ont d’ailleurs rien d’exceptionnel puisqu’au cours de la décennie qui a précédé la pandémie de COVID-19 (de janvier 2010 à janvier 2020), la croissance annuelle moyenne des prix des biens de base a été nulle. Par conséquent, si les pressions à la baisse sur les prix des biens commencent à s’essouffler face à une demande intérieure vigoureuse et à une économie qui reste excédentaire, les États-Unis risquent de connaître une nouvelle accélération de l’inflation.  

Q3. Comment les banques centrales perçoivent-elles les effets contrastés sur l’orientation potentielle de leur politique? 

Face à l’impatience des investisseurs de voir les banques centrales commencer à réduire leurs taux d’intérêt, la Réserve fédérale (Fed) et la BdC demandent du temps. Dans le cas de la Fed, sa mesure d’inflation de base privilégiée – le déflateur de base des dépenses personnelles de consommation (DPC) – a davantage progressé que son homologue, l’IPC, en raison notamment de la pondération plus importante des prix des biens (en baisse). D’après notre hypothèse de base selon laquelle les prix des biens pourraient encore baisser, l’inflation de base des DPC devrait continuer à baisser jusqu’à atteindre une fourchette moyenne de 2 % sur 12 mois au cours des prochains   rapports sur l’inflation  . Bien que cela semble être une bonne chose, cette diminution de l’inflation survient à un moment où l’économie américaine s’accélère. L’économie a progressé à un taux annualisé de 4,9 % en glissement trimestriel au cours de l’été et a tout juste « ralenti » à 3,3 % en glissement trimestriel à la fin de l’année 2023. Les prévisions de croissance du PIB pour le premier trimestre se rapprochent à nouveau des 2 %. Cette économie est loin d’être en situation d’offre excédentaire. 

En temps normal, une Fed résolument tournée vers l’avenir devrait anticiper un risque plus élevé d’inflation alimentée par la demande et ainsi s’abstenir d’assouplir sa politique. Cependant, le président de la Fed, Jerome Powell, a récemment indiqué dans un communiqué qu’une économie vigoureuse ne constituerait pas forcément un obstacle dans la mesure où l’inflation continue de baisser. Pour ce faire, il faudrait que les rajustements liés à l’offre demeurent le principal moteur de la récente dynamique désinflationniste ou que les bons résultats des États-Unis en matière de productivité continuent d’offrir une contre-influence opportune aux pressions liées à la demande. Une chose est sûre, les dynamiques doivent être observées sur une plus longue période, en particulier après le rapport décevant sur l’IPC du mois de janvier, qui a rappelé aux investisseurs que ce dernier repli de l’inflation ne sera pas linéaire. La Fed doit être convaincue sans l’ombre d’un doute. Le début d’un cycle de réduction des taux est toujours d’actualité, mais le moment qu’elle choisira fait l’objet de nombreuses tractations. Nous estimons que l’occasion se présentera probablement vers le milieu de l’année. 

Le graphique 3 montre la variation implicite des taux directeurs de la BdC et de la Fed de mars à décembre 2024 en points de base. Il montre que les deux banques centrales devraient réduire leurs taux, mais que c’est la Fed qui mènera la danse.

C’est exactement le contraire qui se produit pour la BdC. L’économie canadienne peine à joindre les deux bouts depuis le printemps dernier. Les dépenses de consommation totales ont stagné, même si la population a augmenté d’environ 3 %. Le marché de l’emploi a également ralenti. Les secteurs cycliques n’ont quasiment pas créé d’emplois depuis août dernier, tandis que la demande de main-d’œuvre par les employeurs s’est normalisée pour atteindre les niveaux d’avant la pandémie. Pourtant, malgré cette piètre situation sur le plan national, la BdC se retrouve coincée avec une inflation supérieure à 3 %. Sur une période de trois mois, les taux d’inflation privilégiés de la BdC ont plus que doublé par rapport à ceux observés au sud de la frontière. Dans un contexte d’inflation élevée, mais de ralentissement de l’économie, la BdC n’est pas non plus disposée à envisager des baisses de taux. 

Malgré la situation différente dans laquelle elles se trouvent, la Fed et la BdC ont communiqué des perspectives similaires quant à la politique à mener. Les taux directeurs sont à leur sommet, mais il ne faut pas s’attendre à une baisse de taux dans l’immédiat, excluant par la même occasion toute possibilité d’une décision lors de la réunion du mois de mars. Après cette date, tout demeure possible, les banques centrales hésitant à laisser transparaître leur intention trop longtemps à l’avance en raison de l’incertitude des données. Les investisseurs s’attendent à une baisse vers le milieu de l’année, ce qui reste raisonnable (graphique 3). Nous estimons toutefois que l’enjeu le plus important n’est pas la date précise du début du cycle de réduction, mais plutôt sa vitesse. À cet égard, nous pensons qu’une réduction de 100 points de base (pdb) d’ici à la fin de l’année est envisageable pour les États-Unis si l’inflation demeure modérée. Si c’est le cas, la Fed pourrait à la fois assouplir sa politique monétaire et maintenir les taux d’intérêt en territoire restrictif afin d’atténuer les risques d’une hausse de l’inflation. 

De son côté, la BdC devra décider dans quelle mesure la politique peut peser sur les coûts de logement, dont elle a déjà souligné publiquement qu’ils sont largement en dehors de sa sphère d’influence en raison des déséquilibres structurels. Elle devra aussi gérer l’autre aspect du risque. L’endettement élevé des ménages a fait grimper les prix des versements hypothécaires, tandis que la consommation s’est essoufflée dans d’autres secteurs de l’économie, bien que la forte croissance démographique soit l’arbre qui cache la forêt. La consommation par habitant s’est contractée au cours de quatre des cinq derniers trimestres. Même si nous pensons que la BdC finira par ne plus adapter exagérément sa politique monétaire à l’influence considérable du logement, elle n’est pas encore prête à annoncer ce virage. Autrement dit, la Fed et la BdC pourraient réduire leur taux au même moment pour des raisons totalement différentes. Des deux, ce sont les Canadiens qui feront face à l’atterrissage le plus brutal.

Q4.  Une résurgence de la demande de logements risque-t-elle de contrevenir aux intentions de réduction des taux des banques centrales?

La baisse des coûts d’emprunt au quatrième trimestre de l’année dernière a entraîné une hausse plus forte que prévu de l’activité immobilière aux États-Unis et au Canada. Toutefois, compte tenu des problèmes du Canada en matière d’inflation des prix des logements déjà évoqués plus haut, cette question semble plus épineuse pour la BdC que pour la Fed. 

Au Canada, les ventes de logements dépassent largement nos précédentes prévisions pour le premier trimestre. Les conditions météorologiques favorables ont probablement aussi joué un rôle à cet égard. La saison des ventes printanières pourrait s’avérer vigoureuse si la BdC décide d’assouplir sa politique monétaire. Cette dynamique s’est manifestée au printemps dernier. La « pause conditionnelle » du taux directeur de la BdC en mars, avril et mai a fait bondir les ventes de logements au Canada de 17 %, tandis que le prix moyen des logements a lui augmenté de 7 %. 

Un marché du logement plus vigoureux que prévu se répercute directement sur le PIB par l’intermédiaire de l’investissement résidentiel et peut également stimuler les dépenses de consommation. Qui plus est, les prix des propriétés et des loyers sont directement pris en compte dans l’IPC canadien au travers de la composante du logement, qui représente 30 % du panier, contre 15 % seulement pour la mesure de l’inflation privilégiée par la Fed. 

Comme nous l’avons déjà indiqué, l’inflation des prix des logements est désormais le principal facteur d’inflation au Canada. Nous pensons, tout comme la BdC, que l’inflation pourrait se rapprocher de la cible de 2 % au fil du temps, même si les coûts de logement persistent. Cependant, une activité plus forte que prévu sur le marché du logement risque de retarder les baisses de taux ou la vitesse à laquelle elles interviennent.

Le graphique 4 présente la croissance sur 12 mois de trois séries : l’indice des prix des logements – DPC et l’indice des prix des nouveaux loyers (avec une avance de trois trimestres) à gauche, ainsi que l’indice des prix des maisons CoreLogic (avec une avance de six trimestres) à droite. Le graphique montre que, selon la progression de l’indice des prix des nouveaux loyers et de l’indice des prix des maisons CoreLogic, l’inflation des DPC liées au logement devrait continuer de baisser au cours des prochains mois.

Attendre que l’inflation des prix des logements se comporte bien (surtout si les marchés du logement retrouvent de la vigueur) avant de rajuster la politique risque d’être trop préjudiciable au reste de l’économie. D’autre part, les attentes d’inflation au Canada sont également influencées par les coûts du logement. Ce qui ne fait aucun doute, c’est que la BdC devra relever un défi de taille en matière de communication lorsqu’elle décidera d’assouplir sa politique.

Le marché du logement aux États-Unis a vu les ventes de maisons en attente augmenter de 8,3 % en décembre, signe d’une reprise de la demande de logements pour terminer l’année. Bien que la hausse modérée des taux à long terme et des taux hypothécaires au cours de ces dernières semaines ait probablement nui à cette vigueur naissante, il est fort probable qu’une fois que la Fed commencera à réduire les taux d’intérêt, l’activité immobilière se rétablisse rapidement. 

Malgré cela, il existe une poche d’air pour la Fed. L’actuelle dynamique du logement aux États-Unis a témoigné d’un certain soulagement lié à un ralentissement du marché locatif , qui se traduit par un décalage notable de plusieurs trimestres par rapport aux mesures de l’inflation (graphique 4). Si l’on compare cette composante de l’inflation aux prix des logements (lesquels ont tendance à avoir un impact sur les loyers à long terme), on obtient un résultat similaire. Cela donne à penser que la hausse de l’inflation des prix des logements pourrait encore se tasser avant de commencer à s’inverser à nouveau à la fin de cette année. Cet « effet de vagues » dans la façon dont les décalages se répercutent offre à la Fed la possibilité de réduire les taux d’intérêt, même en cas de ventes importantes de logements au cours du printemps. Toutefois, il s’agit également d’un argument de poids en faveur d’une approche « lente » de l’assouplissement de la politique monétaire. Les membres du FOMC ne prévoient que 75 pdb de réduction cette année, soit la moitié moins que ce que les marchés anticipaient il y a un mois. À l’instar de la Banque du Canada, la complexité de l’inflation des prix des logements posera également un défi à la Fed en matière de communication.

Q5. Quelles répercussions les récents changements apportés à la politique d’immigration du Canada auront-ils sur l’économie? 

En 2023, la population canadienne a connu une croissance spectaculaire de 2,8 %, soit d’environ 1,1 million de personnes. Cette croissance fulgurante explique en grande partie comment l’économie intérieure canadienne est parvenue à se maintenir à flot durant la campagne de resserrement historique de la BdC. Pour sa part, l’immigration a contribué à combler le manque de main-d’œuvre, à stimuler l’emploi et à soutenir les dépenses globales. Désormais, le rythme trop marqué et trop rapide de la croissance a créé des déséquilibres qui pèsent sur l’abordabilité des logements, alimentent la hausse rapide des loyers et mettent à rude épreuve la capacité des services publics du pays. Pour surmonter ces difficultés, les décideurs ont mis en place une série de mesures visant à réduire l’afflux historique de migrants.

Le graphique 5 montre la croissance de la population canadienne de 2016 à 2023 et comprend nos prévisions pour 2024 et 2025. En 2023, la population a augmenté d’environ 1,25 million de personnes. Selon nos prévisions, cette croissance devrait ralentir en 2024 et 2025. Nous estimons qu’en raison de la nouvelle politique de permis d’études de 2024, la population du Canada augmentera de 120 000 personnes de moins (pour un total de 703 000) en 2024 et de 100 000 personnes de moins (pour un total de 581 000) en 2025. Cela représente toujours une croissance démographique élevée par rapport à la moyenne de 500 000 nouveaux habitants observée entre 2016 et 2019.

En novembre 2023, le gouvernement fédéral a publié les détails de son Plan des niveaux d’immigration de 2024-2026. Dans ce document, les cibles relatives aux résidents permanents sont demeurées inchangées à 485 000 et à 500 000, respectivement pour 2024 et 2025, et une nouvelle cible de 500 000 a été établie pour 2026. Le Plan met davantage l’accent sur le recours à des travailleurs hautement qualifiés  , qui devraient représenter près de 25 % de tous les nouveaux arrivants permanents cette année, contre environ 18 % en 2023. 

Plus récemment, le gouvernement fédéral a fixé un plafond avec effet immédiat sur le nombre de visas accordés aux étudiants étrangers. La réduction ciblée, chiffrée à 35 %, soit 220 000 autorisations d’études en moins par rapport à l’année dernière, maintiendrait le nombre total d’étudiants étrangers à un niveau stable au cours des deux prochaines années. Bien que les provinces doivent encore peaufiner tous les mécanismes du programme, la croissance démographique est désormais en passe de décélérer à un rythme légèrement plus rapide en raison de cette nouvelle politique (graphique 5). Le plafond appliqué aux étudiants étrangers permettra également d’atténuer la pression sur la croissance des loyers, même si cette mesure n’offre pas une solution intégrale (voir le rapport). 

La catégorie des résidents non permanents, qui est principalement composée de titulaires de permis de travail et d’études, est celle qui a le plus contribué à l’explosion démographique au Canada. Le gouvernement songe désormais à revoir le programme afin de réduire la dépendance du pays à l’égard des travailleurs étrangers temporaires. Aucun autre renseignement n’est disponible pour le moment, mais les changements apportés au programme pourraient contribuer à atténuer les difficultés structurelles qui affectent le secteur du logement et le tissu social de l’économie. 

Quoi qu’il en soit, le gouvernement semble plus soucieux de trouver un juste équilibre avec la croissance démographique du Canada, tout en préservant ses besoins en matière d’immigration (voir le rapport). Ces mesures contribueront en partie à rétablir l’équilibre de l’économie canadienne.

Q6. Quel impact la politique budgétaire américaine devrait-elle avoir sur la croissance? 

Les politiques budgétaires fédérales ont été un élément clé des excellentes performances des États-Unis au cours des dernières années. Ces politiques comprenaient des milliers de milliards de dollars de mesures de relance économique liées à la pandémie de COVID-19 en 2020 et 2021, ainsi que des lois historiques plus récentes que sont l’Infrastructure Investment and Jobs Act (IIJA), le CHIPS & Science Act et l’Inflation Reduction Act (IRA). Ces trois projets de loi ont abouti à des investissements publics et privés massifs, et ce, malgré une hausse rapide des taux d’intérêt. Bien que les premiers effets des mesures de relance se soient partiellement dissipés, chacune d’entre elles devrait continuer à soutenir la croissance économique au fur et à mesure que les travaux se poursuivent sur les projets connexes.

Le graphique 6 présente la contribution annuelle en points de pourcentage de la consommation et des investissements du gouvernement à la croissance du PIB réel, répartie entre le gouvernement fédéral, les États et les administrations locales. Entre 2011 et 2014, les dépenses publiques ont freiné la croissance économique, avant de la soutenir entre 2015 et 2020, la période 2019-2020 ayant été marquée par une vigueur considérable. La part des dépenses publiques dans la croissance du PIB a glissé en territoire légèrement négatif entre 2021 et 2022, avant de rebondir fortement en 2023 pour atteindre des niveaux conformes à ceux de la période 2019-2020. La contribution des dépenses publiques à la croissance du PIB devrait diminuer progressivement entre 2024 et 2025.

Cependant, les nouvelles mesures du gouvernement fédéral en matière de dépenses devraient être limitées en 2024, le Congrès ayant fixé des plafonds pour les dépenses discrétionnaires dans le budget annuel qui n’a pas encore été adopté. Selon une entente provisoire entre les dirigeants du Congrès, les dépenses de défense devraient augmenter d’environ 3 %, tandis que les autres dépenses demeureraient stables, conformément aux limites prévues dans la Fiscal Responsibility Act (FRA) de 2022. Toutefois, le gouvernement fédéral se finance actuellement dans le cadre d’une résolution de continuation qui s’étend jusqu’au début du mois de mars, la troisième résolution de ce type adoptée depuis le début de l’exercice en octobre. Si le budget de 2024 n’est pas adopté d’ici le 30 avril, il y aura automatiquement des réductions des dépenses imposées par la FRA, notamment en réduisant de 1 % les dépenses discrétionnaires liées ou non à la défense. Bien que cela représente un faible risque pour les perspectives économiques, les dépenses fédérales devraient connaître une croissance plus lente à l’avenir, même si les réductions de la FRA accéléraient le repli (graphique 6).

En outre, la croissance des dépenses des États et des administrations locales a également été soutenue. Les budgets des États ont été renforcés par les 350 milliards de dollars de fonds de redressement budgétaire des États et des administrations locales prévus par l’American Rescue Plan Act de 2021. Ces fonds doivent être répartis d’ici la fin de l’année et dépensés d’ici la fin de 2026. Les dépenses des États et des administrations locales ont également été soutenues par les projets associés aux mêmes lois fédérales que celles mentionnées ci-dessus (IIJA, CHIPS, IRA). La concurrence pour attirer les investissements connexes du secteur privé a encore accru les dépenses des États et des administrations locales, générant ainsi un autre facteur favorable qui mettra du temps à se résorber.

Q7. Qu’est-ce qui freinera le rythme soutenu de l’économie américaine en 2024?

L’économie américaine a progressé de façon fulgurante au cours du deuxième semestre de 2023, ce qui a fait en sorte que les analystes, y compris nous-mêmes, se sont lourdement trompés dans leurs prévisions. La croissance moyenne au deuxième semestre a été de 4 % et la période d’octobre à décembre a marqué le sixième trimestre consécutif où la croissance économique a atteint ou dépassé son taux de croissance potentiel à long terme, même si le taux des fonds fédéraux demeure largement en territoire restrictif. 

Le graphique 7 présente les projections du Congressional Budget Office (CBO) relatives aux dépenses d’investissement en infrastructures prévues par les États et les administrations locales pour la prochaine décennie. En 2023, les dépenses n’étaient que de 21 G$, ce qui représente une forte hausse par rapport aux 3 G$ de 2022. Les dépenses devraient atteindre un sommet d’environ 68 G$ en 2026 et 2027, avant de reculer à 8 G$ d’ici à 2033. Les données proviennent du CBO en date de février 2024.

Les dépenses de consommation ont constitué l’un des principaux catalyseurs, même si l’épargne excédentaire s’est progressivement amenuisée et que des millions d’emprunteurs ont recommencé à rembourser régulièrement leurs prêts étudiants. Cette vigueur soutenue est attribuable à la solidité du marché de l’emploi et à la hausse continue du revenu réel des ménages. La baisse des prix de l’essence et l’assouplissement de l’inflation des prix aliments ont également constitué des facteurs favorables, en libérant des liquidités supplémentaires qui ont finalement permis d’accroître les dépenses discrétionnaires. 

Comme décrit à la question 6, les États et les administrations locales ont également joué un rôle important, contribuant à hauteur de 0,4 point de pourcentage à la croissance en 2023 (voir le graphique 7). Cette augmentation des dépenses pourrait très bien se poursuivre au cours des prochaines années, d’autant plus que les fonds d’aide liés à la COVID-19 devront être utilisés à des fins précises d’ici à la fin de l’exercice 2024 (et déployés d’ici à la fin de l’exercice 2026). De plus, ce n’est que récemment que les financements autorisés en vertu de l’IIJA ont vu la construction de leurs premières infrastructures se concrétiser (graphique 7). 

Tous ces éléments donnent l’impression que l’économie américaine est à l’abri d’une hausse des taux d’intérêt, mais il est plus probable que les retards soient simplement plus marqués dans ce cycle post-pandémie. Sur le plan de la consommation, la croissance des dépenses est désormais largement supérieure à celle des revenus, ce qui accroît la dépendance des ménages à l’égard du crédit à la consommation, comme en témoigne l’augmentation des taux d’utilisation des cartes de crédit. L’épargne excédentaire des ménages à revenus faibles à moyens étant largement épuisée, les dépenses de consommation disposent de moins de sources de croissance. Des obstacles subsistent également en raison du resserrement des normes de crédit, des taux d’intérêt élevés et de l’incertitude politique liée à l’élection présidentielle qui pourrait peser sur l’investissement des entreprises à court terme. Malgré ces obstacles, la croissance américaine devrait tout de même progresser de 2,3 % cette année, soit un taux d’expansion comparable à 2023. L’année a commencé en force en raison du solide élan observé en 2023, ce qui soutient la croissance annuelle moyenne; cette dernière devrait toutefois ralentir à 1,5 % d’ici la fin de l’année (d’un quatrième trimestre à l’autre). Toutefois, même ce rythme surpassera de loin celui de ses pairs. Autrement dit, le thème mondial de l’exceptionnalisme américain demeurera intact pendant encore au moins un an.

Q8.Quels sont les risques pour l’immobilier commercial américain?

La hausse des taux d’intérêt n’a pas profité à l’immobilier commercial, les opérations s’étant taries et la valeur des propriétés  , en particulier dans le secteur des immeubles de bureaux, ayant tendance à baisser. Avec approximativement 540 milliards de dollars par an en 2024 et 2025, le volume des prêts immobiliers commerciaux arrivant à échéance devrait rester élevé, mais relativement stable par rapport à l’année dernière. Cependant, la détérioration continue des paramètres fondamentaux globaux du marché laisse présager des perspectives potentiellement plus mouvementées. L’immobilier commercial demeure un risque à long terme dans les prévisions. Il faudra encore du temps pour que la situation évolue, et il est probable que certaines institutions financières subissent des chocs. Toutefois, on ne pense pas que le secteur puisse compromettre la stabilité financière au point de perturber l’ensemble de l’économie. 

Le graphique 8 présente les taux d’inoccupation dans quatre secteurs clés de l’immobilier commercial. Les données remontent à l’année 2000. Le graphique montre que le taux d’inoccupation des immeubles multirésidentiels et industriels est en hausse depuis plusieurs trimestres, tandis que le taux d’inoccupation du secteur des immeubles de bureaux atteint un sommet historique. Le secteur des immeubles de commerce de détail est le seul dont le taux d’inoccupation a continué de diminuer au cours des derniers trimestres.

Jusqu’à présent, le taux de défaillance de tous les prêts immobiliers commerciaux émis par les banques aux États-Unis est de 1,1 %, nettement inférieur aux périodes de tension précédentes, comme la crise financière mondiale, mais il enregistre tout de même une hausse notable ces derniers temps. La faiblesse du secteur de l’immobilier commercial reste centrée sur le marché des immeubles de bureaux, où le taux d’inoccupation a atteint un sommet historique. Les données sur les prêts des titres adossés à des créances hypothécaires commerciales (TACHC) montrent que le taux de défaillance des prêts adossés à des immeubles de bureaux a fortement augmenté au cours de la dernière année, passant de 1,9 % il y a un an à 6,3 % en janvier. Les autres principaux segments de l’immobilier commercial sont généralement mieux placés pour résister à la pression des prêts arrivant à échéance dans un contexte de taux d’intérêt élevés, mais la hausse du taux d’inoccupation dans le segment des immeubles industriels et de l’immobilier multifamilial pourrait faire apparaître de nouveaux signes de tension (graphique 8). Du côté positif, les perspectives d’une nouvelle baisse des taux à long terme et la relative résilience de l’économie américaine devraient contribuer à limiter les retombées. 

Environ la moitié des prêts qui devraient arriver à échéance au cours des prochaines années proviennent   du secteur bancaire. Comme on l’a vu, certaines petites banques régionales sont plus exposées aux titres de créance du secteur de l’immobilier commercial, et les pertes potentielles liées à ces prêts peuvent engendrer des difficultés financières pour ces institutions. Cependant, leur exposition au segment le plus faible de ce secteur – le marché des immeubles de bureaux – est plus limitée. Qui plus est, si l’on tient compte des protagonistes extérieurs au secteur bancaire qui ont recours aux prêts immobiliers commerciaux (compagnies d’assurance vie, TACHC, etc.), l’exposition globale et les risques perçus liés aux petites banques sont nettement plus faibles. Quant aux grandes banques, elles sont mieux capitalisées pour résister aux tensions. Tous ces éléments devraient servir à limiter les risques, ou la nature systématique de ces derniers au sein de l’économie en général. Récemment, le président de la Fed, Jerome Powell, s’est exprimé sur ce sujet, soulignant la possibilité que certaines petites banques puissent être confrontées à des fermetures ou à des fusions, mais il a déclaré que les risques liés à l’immobilier commercial représentaient un défi « gérable » pour les grandes banques et qu’une réédition de la crise de 2008 était peu probable.

Q9. Le Canada est-il exposé à des risques similaires en ce qui a trait à l’immobilier commercial?

Probablement pas. L’exposition aux prêts immobiliers commerciaux est faible, du moins pour les banques, la BdC constatant que les prêts hypothécaires sur immeubles non résidentiels représentent environ 2 % de la valeur totale de leurs actifs. Comme aux États-Unis, le secteur canadien des immeubles de bureaux est en difficulté. Toutefois, le nombre de travailleurs qui retournent au bureau augmente, ce qui améliore légèrement les perspectives. Le secteur des immeubles multirésidentiels éprouve lui aussi des difficultés en raison de la hausse des taux d’intérêt, mais les perspectives à moyen terme sont encourageantes compte tenu de la forte croissance démographique et de la grave pénurie de logements qui sévit au Canada. Ailleurs, les catégories d’actifs que sont les immeubles industriels et les immeubles de commerce de détail résistent mieux que les catégories des immeubles de bureaux et des immeubles multirésidentiels.

D’une manière générale, les États-Unis comptent des milliers de petites banques régionales fragmentées, ce qui accroît le risque qu’un prêteur donné soit confronté à des difficultés en raison d’un manque de diversité dans son portefeuille de prêts. Les récentes turbulences de la New York Community Bancorp en sont un exemple : ce prêteur de taille moyenne a été confronté à de graves difficultés en raison de sa surexposition à l’immobilier commercial. La même situation a également été observée au début de l’année dernière avec la Silicon Valley Bank, dont la faillite était en partie imputable à une surexposition aux bons du Trésor américain et à une trop grande dépendance à l’égard d’un secteur des technologies en difficulté.

En comparaison, le système de prêts du Canada est composé d’un moins grand nombre de prêteurs de plus grande taille, dont les modèles d’affaires et les sources de financement sont plus diversifiés. Le secteur bancaire canadien se caractérise par une meilleure uniformité dans l’application de solides réserves de capitaux, de bons bilans et d’importantes réserves pour pertes sur prêts. Les banques sont également soumises à des normes rigoureuses en matière de liquidités fixées par les organismes de réglementation fédéraux. D’autres prêteurs canadiens sont plus exposés, et des estimations laissent entrevoir des niveaux d’exposition de 5 % à 20 % pour certaines caisses de retraite canadiennes. Malheureusement, le manque de données rend difficile la détermination de la prépondérance des prêteurs non bancaires dans le secteur non résidentiel. Par conséquent, cette zone grise constitue un risque.

Q10. Au Canada, l’atterrissage en douceur n’est pas sans heurts. Comment l’économie va-t-elle se redresser?

Bien que l’économie canadienne soit en passe de connaître ce que les économistes qualifient d’atterrissage en douceur, la situation peut encore sembler difficile pour le consommateur moyen. L’objectif de la BdC de hausser les taux d’intérêt juste assez pour ralentir l’économie et réduire l’inflation – sans déclencher une récession – n’atténue pas les difficultés financières de nombreux ménages. La combinaison de niveaux d’endettement plus élevés des ménages et d’un contexte de taux d’intérêt élevés signifie que, dans l’ensemble, les Canadiens endettés paient près de 90 % de plus en intérêts hypothécaires et 60 % de plus en intérêts non hypothécaires qu’avant le début du relèvement des taux par la BdC. En 2024, le coût du service de la dette devrait s’élever à 2 800 dollars supplémentaires par an pour une famille moyenne. 

Le graphique 9 présente la variation sur 12 mois en pourcentage de la consommation moyenne des ménages corrigée de l’inflation, ventilée par quintile de revenu du T1 au T3 de 2023. La variation sur 12 mois en pourcentage des dépenses est passée d’un territoire positif (allant de 0,9 % à 2,8 %) au premier trimestre à un territoire négatif (allant de -0,2 % à -2,4 %) au troisième trimestre pour toutes les catégories de revenus à l’exception du cinquième quintile de revenus (le plus élevé). Ce dernier quintile a vu une augmentation des dépenses de 1 % sur 12 mois au cours du troisième trimestre de 2023.

De plus en plus de Canadiens accusent un retard dans le remboursement de leurs dettes, une tendance qui se reflète jusqu’à présent davantage dans la dette à la consommation (c’est-à-dire les cartes de crédit et les prêts) plutôt que dans la dette hypothécaire. Selon TransUnion, le taux de défaillance (retard de plus de 90 jours) pour les cartes de crédit et les prêts remboursables par versements a déjà dépassé les niveaux d’avant la pandémie ou s’en rapproche fortement. Cette situation reflète essentiellement le contexte de taux d’intérêt élevés, car les pertes d’emploi restent limitées. Toutefois, à mesure que le taux de chômage continuera d’augmenter et que le revenu personnel diminuera, les conditions de crédit devraient encore se détériorer, car les familles éprouvent de plus en plus de difficultés financières. 

Par conséquent, les consommateurs restreignent leurs dépenses. Dans l’ensemble, la croissance des dépenses réelles est modeste, dans le meilleur des cas, et se contracte en données par habitant. Les tendances en matière de dépenses selon les quintiles de revenus des ménages montrent que les dépenses réelles diminuent sur 12 mois dans tous les groupes, à l’exception de la tranche supérieure de 20 % (graphique 9 ). Ce constat n’a rien de surprenant, compte tenu du fait que les familles à revenus élevés ont été moins affectées par la fin des mesures de soutien du gouvernement liées à la pandémie et que leurs revenus de placement nets ont été stimulés par des taux plus élevés grâce à un moindre fardeau de la dette.

Nous nous attendons à ce que cette dynamique se poursuive, malgré la hausse temporaire des dépenses observée à la fin de l’année 2023 (voir le rapport). Par conséquent, nous prévoyons une croissance anémique des dépenses personnelles en 2025, freinant ainsi la croissance globale du PIB, car l’offre excédentaire reste toutefois présente au cours de cette période.

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