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Aborder les sujets liés aux perspectives économiques et financières

date publiée: 19 février 2025

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Nos prévisions de décembre, intitulées 2025 : une année marquée par la rapidité et le dynamisme, se sont concrétisées! En à peine quatre semaines depuis son entrée en fonction, le président Trump a publié un nombre record de décrets, et il agite les marchés en annonçant de nouveaux droits de douane tous les jours. Sans surprise : les questions et réponses de ce trimestre sont dominées par les discussions sur les répercussions potentielles. Nous avons modifié nos prévisions concernant les taux d’intérêt et la croissance économique, en particulier pour le Canada. Les événements ayant fait les manchettes ont occulté le fait que les économies américaine et canadienne ont démarré l’année 2025 sur une note plus favorable que prévu, grâce aux consommateurs. Cela signifie que les changements dans les prévisions s’expliquent par une base de comparaison plus élevée. Le Canada reste le pays qui subira la plus grande part de l’incertitude et des répercussions potentielles sur les investissements. Toutefois, un nouveau tournant se dessine. Le pays trouvera-t-il de nouveaux moteurs de croissance, dans le contexte d’une crise existentielle? Il incombe aux décideurs d’agir de toute urgence pour créer un environnement d’affaires concurrentiel.

Q1. En quoi les perspectives économiques mondiales ont-elles changé, à la lumière des récents développements concernant les droits de douane?    

Fidèle à sa promesse de campagne, le président Trump a immédiatement annoncé des droits de douane de grande envergure, dès son premier jour. Il a demandé aux secrétaires du Trésor et du Commerce, ainsi qu’au représentant au Commerce des États-Unis d’ouvrir une enquête sur les pratiques commerciales « injustes et déséquilibrées » à l’égard des États-Unis, la date limite pour soumettre des recommandations spécifiques étant fixée au 1er avril. Pourquoi attendre? Le 1er février, le président a annoncé un droit de douane universel de 25 % sur le Canada et le Mexique, ainsi qu’un droit de douane de 10 % sur la Chine. Au cours de ce qui pourrait devenir la marque de commerce de cette administration, des négociations de dernière minute ont abouti à un report de 30 jours de la mise en œuvre de ces mesures. Il n’en a pas été de même pour la Chine, où les droits de douane sont entrés en vigueur le 1er février, avec des mesures de rétorsion prévoyant tout autant un contrôle des exportations de minéraux essentiels que des droits de douane sur les importations en provenance des États-Unis. Le 10 février, le président a annoncé des droits de douane de 25 % sur les expéditions d’acier et d’aluminium de tous les pays. La date limite du 1er avril semble nébuleuse à ce stade.  

Comment faire des prévisions dans ce contexte?! C’est dans ces moments que l’analyse de scénarios fondée sur des hypothèses prend tout son sens, d’autant plus que nos hypothèses pourraient devoir être rajustées plus fréquemment. Voici nos hypothèses de base initiales sur les États-Unis

  • Début avril, le président Trump imposera de nouveaux droits de douane sur la Chine, l’Union européenne et d’autres grands partenaires commerciaux. 
  • Il est supposé que le taux tarifaire effectif des États-Unis passera du niveau actuel de 3 % à un sommet de 7,5 % au troisième trimestre.  
  • Les droits de douane devraient rester en place pour le reste de l’année, avant d’être largement éliminés d’ici le milieu de 2026. 
  • Les mesures de rétorsion appliquées par les partenaires commerciaux sont incorporées au modèle. 
  • Les gouvernements des autres pays chercheront à soutenir les entreprises et les ménages. 

À l’échelle mondiale, l’impact est faible. La croissance n’est ralentie que de 0,1 point de pourcentage. La Chine est l’une de ces économies où les mesures de relance gouvernementales devraient compenser une partie de l’effet négatif. Des emprunts spéciaux de 2 % du PIB environ sont déjà annoncés, et les autorités sont susceptibles de les augmenter afin de maintenir le dynamisme économique autour de 5 %. En Europe, une certaine compensation budgétaire pourrait venir de l’Allemagne, en fonction des résultats des prochaines élections. L’économie allemande est l’une des plus sensibles au commerce international, et ce pays aura peu de tolérance à l’égard d’une nouvelle stagnation économique après plusieurs années de stagnation déjà. En revanche, la marge de manœuvre budgétaire du Royaume-Uni et de la France est limitée, ce qui complique leur tâche pour compenser l’effet des droits de douane sur leurs économies. 

Du côté du Canada, les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral s’entendent sur les mesures de soutien budgétaire et de riposte tarifaire. Toutefois, quelles que soient les décisions finales en matière de droits de douane, notre hypothèse est que les menaces persistantes et désordonnées brandies par le président créent un climat d’incertitude suffisant pour affaiblir les investissements des entreprises et réduire les échanges commerciaux. Par conséquent, nous avons revu à la baisse les perspectives canadiennes pour les porter à un faible taux trimestriel de 1,3 % à partir du printemps 2025 et jusqu’à la fin de l’année. Il s’agit d’une chute importante par rapport à la moyenne trimestrielle de 2,1 % enregistrée entre le quatrième trimestre de 2024 et le premier trimestre de 2025 (pour en savoir plus sur les relations commerciales du Canada avec les États-Unis, consulter notre récent rapport). 

Aux États-Unis, le dynamisme économique sera freiné de 0,2 à 0,3 point de pourcentage en 2025, car de nouvelles annonces de droits de douane ont entraîné un resserrement des conditions financières, tandis que la répercussion de l’inflation se traduit par une modeste érosion du pouvoir d’achat des consommateurs. 

Pour en revenir au concept de l’analyse de scénarios, nous allons examiner ce qui se passera si le Canada et le Mexique ne parviennent pas à échapper aux droits de douane de 25 % à l’échelle de leur économie, lesquels sont attendus à partir du 4 mars. Notre analyse est fondée sur des intervalles de durée, selon que les droits de douane seront pleinement appliqués sur des périodes de six mois, un an ou deux ans (voir le Table 1). Nous avons choisi une période de six mois comme point de départ pour examiner les scénarios, car c’est à partir de cette durée que l’économie canadienne tomberait en récession et que le taux de chômage atteindrait un sommet de 7,7 % au cours de l’année. Les choses empirent avec le temps. Les scénarios tiennent également compte des résultats du Canada avec ou sans mesures de soutien budgétaire. Les dépenses publiques de soutien budgétaire constituant 2 % du PIB dans le pire des scénarios procurent un certain soulagement à l’économie. D’un autre côté, ces dépenses pourraient avoir un impact inflationniste. En ce qui concerne le marché de l’emploi, l’impact des mesures de soutien budgétaire dépendra du type de mesures que le gouvernement choisira de mettre en œuvre. Par exemple, la mise en place de subventions salariales, comme pendant la pandémie, réduirait l’impact sur le taux de chômage (pour en savoir plus, consulter la question 9). Aux États-Unis, la croissance serait ralentie de 0,2 point de pourcentage supplémentaire dans le scénario de 6 mois, tandis que le taux de chômage culminerait à 4,6 % au troisième trimestre avant de s’améliorer une fois les droits de douane éliminés

Q2. Comment les banques centrales réagiront-elles aux scénarios de guerre commerciale?   

Chart 1 shows the Fed and BoC policy rates in % from 2020 to 2026. It shows both central banks are going to keep cutting, but the Fed will do it at a slower pace.

Les guerres commerciales donnent lieu à une énorme incertitude pour les banques centrales. La Réserve fédérale américaine (la Fed) et la Banque du Canada (BdC) réagiront selon la façon dont elles évaluent l’importance du choc sur leur croissance économique relativement à la perspective d’une inflation élevée de manière permanente. 

Les banques centrales devraient (en théorie) ignorer l’augmentation immédiate de l’inflation, car un choc du côté de l’offre ne peut pas être résolu par une hausse des taux d’intérêt. Le risque à observer serait donc celui d’un repli de la croissance. Toutefois, la vie n’est rarement aussi simple. Même une hausse temporaire de l’inflation peut faire grimper les attentes d’inflation à long terme, surtout lorsque les ménages se montrent déjà très sensibles aux prix. Dans ce cas, rester inactif n’est pas une option. La pandémie donne un aperçu de cette idée. Au début, les banques centrales ont vu la hausse de l’inflation comme un événement passager, attribuable à la réouverture de l’économie après la pandémie. Mais finalement elles ont dû relever vigoureusement les taux pour stabiliser les attentes d’inflation. C’est pourquoi certains porte-parole de la Fed ont déjà souligné qu’ils ne pas peuvent ignorer un choc de l’inflation induit par les droits de douane. Dans notre hypothèse de base, nous prévoyons que la Fed poursuivra sa pause à court terme. En supposant une meilleure clarté à propos des droits de douane d’ici l’été et l’absence d’approches universelles, l’inflation et les attentes d’inflation devraient être suffisamment ancrées pour permettre à la Fed de reprendre de modestes réductions de taux. Nous nous attendons à ce que le taux directeur termine l’année à 4,0 % (graphique 1). 

Dans le passé, la BdC a démontré qu’elle pouvait être plus énergique dans ses mesures de réduction de taux, ce qui, selon nous, restera le cas, du fait que les prévisions économiques auront plus de mal à rester à flot au nord qu’au sud de la frontière. Nous nous attendons à ce que la BdC programme des réductions de taux au premier semestre de 2025 et porte son taux directeur à 2,25 % d’ici le printemps. L’élargissement de l’écart des taux directeurs entre les deux banques centrales devrait accentuer les pressions à la baisse sur le huard, ou entraver une percée durable au-dessus de 70 cents jusqu’en 2026     

Q3. Comment les marchés ont-ils réagi jusqu’à maintenant [aux menaces tarifaires], et y a-t-il des zones d’ombre qui commencent à s’éclaircir?

Chart 2 shows the exchange rate of the Canadian dollar relative to the U.S. dollar over the past year. The Canadian dollar averaged a valuation around 0.74 through most of 2024, before falling closer to a 0.70 level in the final months of the year and into 2025. On February 3rd, the Canadian dollar fell to an intra-day level just below 0.68 due to the risk of tariffs, before returning to a 0.70 level after it was announced that the tariffs would be suspended.

Jusqu’à présent, la réaction des marchés financiers aux droits de douane est relativement modérée et sans grande conséquence. Toutefois, c’est plus une question de moment que d’indifférence totale. À l’exception de l’acier et de l’aluminium, le président Trump a fait ses annonces officielles de droits de douane de grande envergure pendant la fin de semaine, alors que la plupart des marchés étaient fermés. De plus, les mesures politiques les plus significatives ont été suspendues peu de temps après, à la suite de négociations avec les pays ciblés. Cela signifie que les participants au marché ont eu peu de temps pour réagir au cours des heures de négociation. 

Les plus fortes réactions des marchés ont été observées entre le décret du 1er février sur le fentanyl, contenant une menace de droits de douane à l’encontre du Canada, du Mexique et de la Chine, et la date de mise en œuvre du 4 février. C’est à ce moment-là que les marchés ont commencé à tenir compte des risques associés au programme tarifaire audacieux des États-Unis dans le cadre d’une guerre commerciale nord-américaine. Le dollar canadien et le peso mexicain ont chuté d’environ 2 % à 3 % par rapport au dollar américain aux premières heures de la journée de lundi, et les marchés boursiers américains ont trébuché dans une mesure comparable. Par ailleurs, les prix du pétrole ont grimpé de près de 3 %, car les marchés ont anticipé que les droits de douane se répercuteraient dans le marché intégré du continent. Toutefois, la réaction a été de courte durée. Vers 10 h, les mouvements s’inversaient déjà, après l’annonce par la présidente mexicaine Sheinbaum que les droits de douane à l’encontre de son pays étaient reportés d’un mois. Le premier ministre Trudeau a fait une annonce semblable plus tard dans l’après-midi. Au cours de la semaine suivante, les marchés nord-américains ont complètement fait volte-face par rapport à leurs premières réactions, malgré l’entrée en vigueur des droits de douane supplémentaires de 10 % sur la Chine comme il avait été annoncé.  

Le dollar canadien est actuellement proche de son sommet de l’année, imperturbable face aux risques tarifaires, mais il reste plombé par les écarts de politique monétaire (graphique 2). Nous nous attendons à ce que le dollar canadien demeure sous la barre des 70 cents américains tout au long de l’année, étant donné que l’écart entre les taux directeurs demeure élevé par rapport aux données historiques et que les risques tarifaires ne sont pas complètement écartés. Si la menace des droits de douane de 25 % était mise à exécution par le président Trump dans l’ensemble de l’économie, le dollar canadien se replierait à environ 60 cents américains, voire en dessous de ce seuil.

Depuis, les marchés financiers ont reporté leur attention sur les rapports de bénéfices des sociétés et les événements macroéconomiques, mais avec les nombreuses menaces tarifaires qui planent toujours à l’horizon, ce répit pourrait s’avérer de courte durée.

Q4. Au rythme où vont les décrets, comment seront-ils intégrés aux perspectives américaines?

Le président Trump n’a pas perdu de temps depuis son retour à la Maison-Blanche, avec la signature de plus de 70 décrets au cours des dernières semaines. Les mesures prises jusqu’à maintenant touchent de nombreux domaines, de la sécurité nationale au climat et à l’énergie en passant par l’immigration, l’économie et les coupes dans les dépenses du gouvernement fédéral. 

Pour ce qui est des perspectives, nous avons porté un jugement sur les droits de douane (voir la question 1), nous avons supposé que le Congrès parviendrait à un accord pour maintenir les réductions d’impôt liées à la Tax Cuts and Jobs Act (TCJA), nous avons considérablement réduit les flux d’immigration et de main-d’œuvre, et nous avons retenu l’hypothèse positive d’un coup de pouce à la croissance attribuable à la déréglementation. Mais au-delà de ces hypothèses, il est trop tôt et trop complexe de dresser des évaluations sur l’impact dans tous les cas de figure possibles, d’autant plus que de nombreux changements politiques restent en suspens et que bon nombre ont un effet à retardement sur le dynamisme économique. Par exemple, la restructuration du gouvernement cadre bien avec ces deux faits.

Chart 3 shows the three-month moving average on non-farm payrolls. After trending lower through 2024, payroll growth has turned higher more recently and is averaging 237k jobs per-month in the three months ending in January. This is considerably above the 150k-175k run rate required to keep the unemployment rate steady. Data is sourced from the Bureau of Labor Statistics.

Une chose est sûre : l’économie américaine est en bonne position pour faire face aux changements. La croissance économique a progressé de 2,3 % en rythme annualisé au quatrième trimestre, et toute la vigueur provient de facteurs nationaux comme les dépenses de consommation, les investissements résidentiels et les dépenses publiques. Les chiffres sur l’emploi de janvier témoignent également de cet élan constant. Les révisions annuelles ont montré un rythme d’embauche encore plus rapide à la fin de 2024 et au début de 2025 (graphique 3). Du fait que la croissance de l’emploi reste au-dessus de 200 000 emplois par mois en moyenne, il n’est pas étonnant que les dépenses de consommation demeurent résilientes. Malgré l’effet des droits de douane, la consommation devrait encore constituer un important facteur de croissance en 2025 (voir les détails à la question 5).

Business investment is also likely to get a lift from rising Les investissements des entreprises devraient également profiter du regain d’optimisme sur les marchés. Plusieurs grandes sociétés technologiques, dont OpenAI, Meta et Alphabet, ont annoncé d’importants investissements dans l’expansion des infrastructures d’intelligence artificielle (IA) au cours des prochaines années. Les investissements dans les centres de données ont triplé depuis 2021, tandis que les dépenses consacrées à la construction d’usines de semi-conducteurs ont augmenté d’un facteur de plus de 16 fois au cours de la même période. Les investissements dans ces deux secteurs représentaient plus de 20 % des dépenses en construction dans le secteur de l’immobilier commercial à la fin de l’année dernière. Cela laisse entrevoir un thème plus large qui devrait se concrétiser en 2025. Les investissements en capital dans le secteur des technologies devraient demeurer robustes, car les États-Unis cherchent à maintenir leur position mondiale dans les progrès liés à l’IA. En même temps, de nombreux projets du secteur manufacturier pourraient être suspendus et la production interrompue jusqu’à ce qu’une stabilité apparaisse quant à l’imposition de droits de douane à l’égard des partenaires commerciaux. Par exemple, à la suite de l’annonce de l’imposition de droits de douane de 25 % sur l’acier et l’aluminium, le United Steelworkers of America a appelé à un effort pour contenir la surcapacité mondiale en ciblant les acteurs les moins coopératifs, comme la Chine, tout en distinguant les partenaires commerciaux de confiance, comme le Canada.

En définitive, la combinaison des décrets intégrés aux prévisions de base ci-dessus n’enlève que quelques dixièmes au PIB en 2025. Du point de vue de l’inflation, les tendances à court terme devraient monter d’ici le deuxième trimestre, car les producteurs répercuteront une partie des coûts tarifaires sur autrui. Toutes choses étant égales par ailleurs, la Fed maintiendra le statu quo plus longtemps que prévu, ce qui signifie qu’il y aura moins de répit sur le front des taux à long terme. Cela remet en cause notre opinion selon laquelle le secteur de l’habitation pourrait enfin tourner la page au deuxième semestre de cette année (voir la question 6). Il est encore trop tôt pour jeter l’éponge, mais les risques s’orienteront à la baisse au fil de cette période d’incertitude tarifaire. Pour l’instant, l’économie devrait enregistrer une croissance de 2,4 % cette année. Le thème de l’exceptionnalisme américain semble encore bien présent, même si un tel rythme marquerait un recul par rapport à ces dernières années qui ont enregistré en moyenne 2,8 %.

Q5. Les consommateurs américains se sont déchaînés; verrons-nous une nouvelle année de chiffres supérieurs aux attentes? 

Chart 4 shows growth in net worth for four age groups during two five-year periods: from 2015 to 2019 and from 2020 to 2024. The age groups shown are households with a head of a household yonger than 40 years old, 40 to 54 years old, 55-69 years old, and older than 70. Other than 40-54 year old group, all the other three age groups have seen stronger wealth gains in 2020-2024 period. The youngest cohort led the way in both time periods, with net worth increasing by 88% between 2020 and 2024. The second fastest growth in net worth during that time was amoung the oldest households (older than 70), where net worth rose by 62% between 2020 and 2024.

Au-delà de l’énorme incertitude politique, une chose qui est sûre est la capacité des perspectives américaines à surprendre à la hausse. Encore une fois, les consommateurs ont battu tous les records l’an dernier. La croissance des dépenses s’est accélérée, passant d’un taux annualisé de 1,9 % au premier trimestre à une explosion de 4,2 % au quatrième trimestre. La croissance des dépenses a surpassé le revenu disponible pendant dix mois sur douze. Ce chiffre est encore plus remarquable si nous tenons compte des taux d’intérêt relativement élevés et du ralentissement de la croissance des salaires. 

Compte tenu de l’élan soutenu de la consommation par rapport à l’an dernier et de la demande persistante de produits de remplacement due aux feux de forêt à Los Angeles et aux ouragans dans diverses régions du pays, nous avons revu à la hausse nos perspectives de dépenses de consommation en 2025 de 50 points de base (pdb) pour les porter à 2,4 %. Toutefois, il existe de la marge de manœuvre pour constater d’autres gains, en particulier si le marché de l’emploi reste résilient et si le Congrès accorde un éventail de baisses d’impôt aux ménages, ce qui augmenterait le revenu disponible. L’une des aides les plus importantes serait l’élimination de l’impôt sur les prestations de sécurité sociale.

Une autre source de hausse des dépenses de consommation pourrait être la robustesse constante des bilans des ménages depuis la pandémie, bien que l’impact soit plus difficile à quantifier. La valeur nette des ménages s’est accrue de 44 % au cours des cinq dernières années, et presque tous les groupes ont enregistré des gains plus élevés qu’au cours des cinq années précédentes (graphique 4). Les niveaux de richesse plus élevés pourraient être l’une des raisons pour lesquelles le taux d’épargne personnelle est plus faible qu’avant la pandémie à l’échelle de l’économie. Le taux d’épargne est tombé à 3,8 % en décembre. C’est beaucoup moins que la moyenne de près de 7 % observée au cours des deux années ayant précédé la pandémie. Compte tenu de son niveau déjà faible, il est difficile de s’attendre à ce que le taux d’épargne diminue davantage. À l’exception de la période de la pandémie, cela s’est produit pendant la frénésie du marché de l’habitation ayant précédé la crise des prêts hypothécaires à risque. 

Alors que le contexte de la consommation est solide, les risques entourant les prévisions sont considérés comme équilibrés. La possible poussée inflationniste liée aux droits de douane représente un risque de baisse. En outre, la reprise du remboursement des prêts étudiants en octobre dernier présente aussi un risque de baisse pour les dépenses de consommation au fil du temps

Q6. Avec des taux obstinément élevés, l’immobilier américain peut-il renaître de façon durable? 

Chart 5 shows the U.S. housing affordability index with the data stretching back to the 1970s. The chart also includes a forecast portion (2025-2027). A higher index value indicates a more affordable environment. The chart shows that at present, the U.S.  housing affordability index remains well below its historical long-term average. The measure is forecasted to improve somewhat over the next three years but is expected to remain below the historical average.

La baisse des taux hypothécaires au printemps et à l’été de l’année dernière a stimulé les investissements résidentiels en fin d’année. Toutefois, le recul des taux obligataires devrait ralentir l’élan du secteur à court terme. Les ventes de propriétés et les demandes hebdomadaires de prêt hypothécaire en cours ont commencé à ralentir. Les taux hypothécaires sur 30 ans oscillent autour de 7 %, soit 80 pdb de plus qu’au moment où la Fed a réduit le taux des fonds pour la première fois en septembre. Par ailleurs, les prix des logements existants n’ont pas cédé, le prix médian ayant augmenté de 6 % sur 12 mois en décembre. À ces niveaux, le versement hypothécaire typique pour une maison unifamiliale existante s’élève à près de 2 200 $, soit plus du double de la moyenne d’avant la pandémie. Au cours de la même période, le revenu familial médian a augmenté de 23 %. Cela constituerait normalement un excellent résultat, mais dans le contexte actuel, cela reflète toujours une abordabilité des logements nettement insuffisante (graphique 5). 

Les prévisions d’inflation et de taux d’intérêt comportent un facteur d’incertitude plus prononcé que d’habitude en raison des changements de politique à Washington (voir la question 1). Toutefois, nous prévoyons une baisse des taux d’emprunt au deuxième semestre de cette année, ce qui devrait contribuer à une hausse des opérations. La stabilité de la reprise dépendra cependant du soutien continu de la construction résidentielle pour améliorer l’abordabilité. L’espoir est qu’une amélioration des tendances dans le secteur de la construction résidentielle – grâce à une réduction des taux d’intérêt et peut-être à un allégement de la réglementation – contribue à freiner la croissance des prix des logements et permette aux revenus de combler l’écart. Toutefois, il s’agira probablement d’un processus à long terme. À court et à moyen terme, d’autres risques dominent, notamment les droits de douane sur les importations de bois d’œuvre et d’autres intrants, ainsi que les restrictions à l’immigration qui peuvent créer une pénurie de main-d’œuvre.

Q7.  Comment l’économie canadienne se comporte-t-elle face à une incertitude élevée?

Chart 6 shows the three-month average percent change in Canadian retail spending across motor vehicle and parts dealers, home-related purchases and total retail sales from January to November 2024, with a flash estimate for December total trade. The series show weak growth or contraction in the early months of the year, followed by a rebound across all three categories starting mid-year. Factoring in the latest estimate for December, the three-month average for retail trade points to a solid 0.8% gain.

L’économie canadienne a terminé l’année 2024 en force et a poursuivi sur cette trajectoire au début de 2025. Le marché de l’emploi a été un pilier de notre économie, avec une croissance de 35 000 emplois par mois en moyenne au cours de la dernière année. Toutefois, au cours des trois derniers mois, ce rythme s’est accéléré pour atteindre 70 000 emplois. Le taux de chômage a également commencé à décliner (passant d’un sommet de 6,9 % à 6,6 % en janvier). La croissance de l’emploi dépasse maintenant la croissance de la population active, et de premiers signes indiquent que la politique démographique du gouvernement fédéral commence à porter ses fruits. De plus en plus de Canadiens travaillent, le nombre d’heures travaillées augmente et la croissance des salaires demeure supérieure à l’inflation. En gros, il n’y a rien à reprocher, car les consommateurs se trouvent en bonne position avec plus d’argent dans leurs poches.

Cette croissance stable des revenus soutient les dépenses de consommation, ce qui compense en partie le ralentissement de la croissance démographique. Il y a aussi le coup de pouce attribuable à une réduction cumulative de deux points de pourcentage du taux du financement à un jour, qui commence juste à alléger les pressions sur l’amortissement de la dette. 

Les inquiétudes liées au choc du renouvellement des prêts hypothécaires sont aussi en train de s’estomper, ce qui accroît la confiance et la sécurité des ménages. En même temps, de nombreux Canadiens ont constitué une épargne de précaution, ce qui a fait grimper les dépôts excédentaires (c’est-à-dire supérieurs à la tendance d’avant la pandémie) cumulatifs à environ 153 milliards de dollars, dont une partie sera réinvestie dans l’économie.  

Les réductions de taux ont également ravivé le passe-temps préféré des Canadiens : le magasinage à la maison (graphique 6). Par ailleurs, d’autres dépenses de consommation discrétionnaires ont rebondi grâce à la forte demande d’automobiles, de divertissements et de loisirs. Les mesures de relance gouvernementales, parmi lesquelles l’allégement de la TPS, ont probablement stimulé les dépenses dans le secteur de la restauration, bien qu’il soit encore difficile d’évaluer l’ampleur de l’impact.

Dans l’ensemble, les dépenses de consommation devraient reprendre leur rôle de moteur de la croissance économique, tant que la croissance de l’emploi et des revenus se maintient. Nous nous attendons à ce que la croissance de la consommation personnelle atteigne 2,6 % (en rythme annualisé) au premier trimestre de 2025, avant de ralentir à 1,3 % en moyenne au cours des trois derniers trimestres de l’année (voir la question 1 pour les détails sur les perspectives du PIB). Naturellement, l’incertitude entourant les droits de douane potentiels et les mesures de rétorsion représentent un risque pour nos perspectives de dépenses de consommation.

Q8. Comment les différentes provinces sont-elles exposées aux risques tarifaires? 

Chart 7 shows the average amount of goods exports sent to the U.S. from 2019-2023 by each province and Canada-wide, as a share of their nominal GDPs. U.S. exports equated to 33% of nominal GDP in Alberta, 32% in New Brunswick, 22% in Saskatchewan, 21% in Ontario, 19% for Canada overall, 17% in Newfoundland and Labrador, 16% in PEI and Manitoba, 14% in Quebec, and 8% in B.C. and Nova Scotia.

Les exportations américaines représentent environ le tiers du PIB de l’Alberta et du Nouveau-Brunswick, soit la part la plus élevée parmi les provinces, portées par le secteur de l’énergie (graphique 7). L’Ontario et la Saskatchewan dépendent également des États-Unis dans une mesure importante. La Saskatchewan expédie de l’énergie, des produits de potasse, de l’uranium et des produits agricoles au sud de la frontière. En revanche, l’Ontario s’efforce de s’écarter des ressources au profit du secteur de l’automobile au sein d’une chaîne d’approvisionnement nord-américaine profondément intégrée

Les régions de l’Atlantique sont moins exposées aux risques tarifaires, bien que les chiffres demeurent importants. Les exportations interprovinciales jouent un rôle prédominant dans la région, tout comme les grands secteurs publics. Les secteurs publics représentent également une protection pour le Québec, dans une certaine mesure, tandis que les marchés interprovinciaux jouent un rôle prépondérant pour les exportateurs du Manitoba. À l’Ouest, la Colombie-Britannique est directement protégée par sa dépendance accrue au marché chinois, bien que la demande puisse fléchir en raison des nouveaux droits de douane de 10 % imposés par les États-Unis à la Chine.

Ce sont les expositions. Toutefois, les répercussions pour les provinces sont variables, selon ce qui sera finalement assujetti aux droits de douane. Par exemple, un taux tarifaire de 25 % sur les produits d’acier et d’aluminium canadiens toucherait le plus l’Ontario (acier) et le Québec (aluminium), bien que ces exportations ne représentent que 2 % à 3 % du PIB. À elles seules, les deux économies ont réussi à encaisser le choc, comme en 2018 durant le premier mandat de Donald Trump (même si le taux tarifaire n’était que de 10 % pour l’aluminium à ce moment-là). À l’époque, l’Ontario et le Québec ont généré une très forte croissance économique en dépit des droits de douane qui frappaient certains secteurs. 

Mais l’histoire ne s’arrête pas là. En revanche, les importations en provenance des États-Unis équivalent à 23 % et 11 % du PIB au Manitoba et en Saskatchewan (dans un éventail diversifié de produits), tandis que la part de 21 % en Ontario continue de mettre en évidence l’interconnectivité du secteur de l’automobile. De façon plus générale, les provinces comptent sur les importations des États-Unis, au moins jusqu’à un certain point, ce qui les expose au risque d’inflation lié aux mesures de rétorsion canadiennes.

Q9. Comment le gouvernement peut-il réorienter sa politique afin de protéger le Canada?

Chart 8 is a bar chart demonstrating Canadian jobs tied to exports by industry (in thousands), showing only industries with no more than 20,000 export-related jobs. Dark green bars represent the goods sector. Among the top five sectors most affected by tariffs, four are in the goods sector: auto, metals, computer, and furniture manufacturing (565 thousand jobs); wood, paper, and chemical production manufacturing (335 thousand jobs), mining, quarrying, oil and gas extraction (243 thousand jobs); and food, beverage, and clothing manufacturing (204 thousand jobs).

Les gouvernements de partout au Canada discutent publiquement d’importantes mesures de soutien financier pour atténuer l’impact d’éventuels droits de douane américains. Certains programmes existants n’exigent pas l’adoption de nouvelles lois, ce qui signifie qu’ils peuvent être mis en œuvre rapidement sans intervention du Parlement. Cela comprend les programmes d’assurance-emploi et de travail partagé. Ce dernier programme vise à aider les entreprises et les travailleurs à éviter les mises à pied en période de ralentissement temporaire. Ce programme a été utilisé pour faire face aux droits de douane sur l’acier et l’aluminium en 2018. La durée des ententes de travail partagé a été prolongée de 36 semaines à 76 semaines. Le processus de demande a été simplifié et l’admissibilité a été élargie pour inclure non seulement les entreprises directement touchées, mais aussi celles des secteurs dépendant de chaînes d’approvisionnement connexes, ainsi que les entreprises touchées par les droits de douane de rétorsion.

Au-delà de l’assurance-emploi, le gouvernement pourrait songer à inclure des programmes liés à la pandémie comme les subventions salariales (Subvention salariale d’urgence du Canada – SSUC) ou l’élargissement de l’assurance-emploi (Prestation canadienne d’urgence – PCU). Ces deux mesures nécessitent toutefois un soutien parlementaire.

En fin de compte, les gouvernements ne partent pas de zéro. Depuis la pandémie, nous avons eu amplement le temps d’analyser les choses pour bien choisir les programmes et prendre les décisions appropriées. Par exemple, un programme du style de la SSUC, offrant des subventions aux entreprises des secteurs durement touchés, serait plus pertinent que la PCU qui vise à aider directement les travailleurs, y compris ceux qui ne sont pas admissibles à l’assurance-emploi traditionnelle. 

Toutefois, peu importe les programmes choisis, les gouvernements n’auront pas autant de latitude financière que pendant la pandémie, car l’endettement est maintenant beaucoup plus élevé. Il faut faire preuve de prudence quant à la portée et à la durée de tout programme, même si les droits de douane se révèlent permanents. D’après les estimations précédentes de Statistique Canada relativement aux droits de douane1, si les exportations du secteur des biens déclinaient d’un tiers à cause des droits de douane, environ 640 000 emplois seraient perdus (graphique 8). Offrir une subvention salariale du style de la SSUC à ces travailleurs coûterait environ 2,6 milliards de dollars canadiens par mois au gouvernement. C’est moins que la moyenne mensuelle de 4,2 milliards de dollars canadiens dépensée pendant la pandémie, mais ce n’est certainement pas viable à moyen terme.  

Et s’il y a une chose que nous avons apprise durant la pandémie, c’est que plus important sera le soutien au revenu visant à protéger les Canadiens, plus il y aura de chances pour que les pressions inflationnistes liées aux droits de douane persistent. 

Pour éviter une réaction impulsive, les gouvernements doivent affûter la position concurrentielle du Canada dans l’économie mondiale, indépendamment de la question des droits de douane. L’objectif ultime doit être de faire du Canada la destination privilégiée des entreprises et d’une main-d’œuvre de grande valeur, ainsi que d’attirer l’investissement étranger. Comme il est indiqué ici, les mesures doivent mettre l’accent sur la concurrence sur le plan fiscal, réduire les obstacles et la complexité liés à la réglementation, et assurer un développement responsable de l’énergie et des minéraux essentiels dans des délais raisonnables. Plus les dépenses publiques consacrées au soutien d’initiatives à court terme sont élevées, moins il y aura d’argent disponible pour opérer une réelle transition de l’économie vers un avenir plus prospère et plus résilient.

Q10. Quelle fourchette de résultats pouvons-nous raisonnablement espérer pour le marché de l’habitation canadien cette année?

Les étoiles s’alignent pour une progression au moins modérée des ventes de maisons en 2025. Les facteurs positifs comprennent une demande refoulée, des règles hypothécaires plus souples, une part croissante de Canadiens dans leurs années d’achat de maisons les plus prisées, une croissance économique continue et une baisse des taux d’intérêt. Parallèlement, la croissance du prix moyen des logements sera probablement à la traîne, étant donné l’équilibre entre l’offre et la demande qui favorise les acheteurs en Colombie-Britannique. et l'Ontario.

Cela suppose qu’il n’y ait pas de bouleversement majeur dû aux droits de douane qui feraient dérailler la dynamique.  En effet, même la menace de droits de douane américains semble déjà peser sur la confiance des acheteurs de logements. Les ventes ont chuté en janvier tandis que les nouvelles inscriptions ont bondi, les acheteurs étant anxieux et les vendeurs se dépêchant d'inscrire leurs propriétés avant un éventuel ralentissement économique. L’imposition de droits de douane élevés nuirait aux marchés du travail et affaiblirait le moral des consommateurs, ce qui aurait un impact négatif sur la demande de logements et la croissance des prix des logements. Ces impacts seraient exacerbés par le faible niveau d’accessibilité dans plusieurs régions, l’offre excédentaire des copropriétés dans la région du Grand Toronto et le ralentissement rapide de la croissance démographique. Cependant, la Banque du Canada devrait également réduire les taux d'intérêt plus rapidement dans un scénario tarifaire, ce qui compenserait dans une certaine mesure le marché immobilier.

Tableau 1 : Scénarios de prévisions économiques et financières

Les prévisions des taux d’intérêt et des taux de change sont en date de la fin de la période.
  Prévision de base (moyenne annuelle) Durée de la guerre commerciale
  6 mois 1 an 2 ans
 
  2025 2026 2025 2026 2025 2026 2025 2026
PIB réel (variation en %)                
États-Unis 2.3 2.1 2.1 2.1 2.0 2.0 2.0 1.6
Canada 1.8 1.6 1.1 1.6 1.0 1.2 1.0 0.3
Canada avec exercice 1.8 1.7 1.2 1.8 1.2 1.7 1.2 0.8
Inflation selon l’IPC (variation en %)                
États-Unis 3.0 2.4 3.7 2.0 3.7 2.3 3.7 3.0
Canada 2.2 2.1 2.9 1.8 3.0 2.1 3.0 2.9
Canada avec exercice 2.4 2.2 3.0 1.9 3.0 2.2 3.0 3.0
Taux de chômage (%)                
États-Unis 4.1 4.1 4.3 4.2 4.3 4.5 4.3 4.6
Canada 6.5 6.1 7.2 6.7 7.3 7.2 7.3 8.0
Taux directeur (%, fin de la période)                
États-Unis 4.00 3.00 4.25 3.00 4.50 3.25 4.50 3.50
Canada 2.25 2.25 2.25 2.25 2.00 1.75 2.00 1.50
Taux obligataires sur 10 ans (%, fin de la période)                
États-Unis 4.10 3.75 4.25 3.75 4.35 3.90 4.35 4.00
Canada 3.00 3.00 3.00 3.00 2.90 2.75 2.90 2.65
USD par CAD (fin de la période) 0.71 0.74 0.68 0.71 0.62 0.67 0.62 0.65
WTI (USD/baril, fin de la période) 72 78 65 75 63 71 63 60

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