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Aborder les sujets liés aux perspectives économiques et financières

date publiée: 25 novembre 2025

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Il est difficile d’écrire le moindre mot ces jours-ci sans parler des répercussions des droits de douane, mais ce trimestre a fait surgir de nombreux autres enjeux pour notre série de questions et réponses, comme les effets de la paralysie du gouvernement américain, les signaux du marché de l’emploi et la prochaine modification du taux directeur par la Réserve fédérale américaine (la Fed). Pour le Canada, les projecteurs sont tournés vers les changements de politique, en particulier le budget fédéral, l’immigration et la décision de la Banque du Canada (BdC) de rester sur la touche.

Q1. Pourquoi l’économie mondiale fait-elle preuve de résilience face à une hausse historique des droits de douane?    

Le graphique 1 présente la part des bénéfices dans le produit intérieur brut (PIB) par secteur, pour le secteur privé américain, le commerce de gros, et le transport et les entrepôts, de 2010 au deuxième trimestre de 2025. Alors que, de 2022 à 2025, les bénéfices du commerce de gros représentaient environ 18 % du PIB, ce chiffre est tombé à environ 12 % en 2025 jusqu’à maintenant. La part des bénéfices dans le secteur privé est passée de près de 15 % à environ 13 % jusqu’à présent. Le graphique 2 présente la variation des prix depuis le début de l’année de certaines catégories de biens importés et canadiens. Les prix des biens de consommation et des véhicules automobiles et pièces importés ont chuté cette année, tandis que les prix des biens de consommation canadiens et des biens d’équipement importés ont augmenté.

Le taux tarifaire effectif américain a augmenté rapidement pour atteindre un sommet historique. Pourtant, l’économie mondiale n’a pas fléchi autant ni aussi vite que prévu, et nos perspectives de croissance mondiale restent largement inchangées par rapport à septembre. Cette résilience s’explique par quelques raisons. 

Premièrement, la mise en œuvre des droits de douane a été graduelle, et les entreprises ont fait preuve de prudence en rajustant immédiatement les prix à la consommation dans un contexte d’incertitude et de possibilité de renégociation des accords commerciaux. De plus, les droits de douane effectivement perçus ont été inférieurs aux taux annoncés, et ce, pour diverses raisons. Les chaînes d’approvisionnement se sont détournées des importations assujetties à des droits de douane plus élevés, l’administration américaine a ajusté le tir pour les importations jugées critiques et il y a eu des retards dans la mise en œuvre de la perception des droits de douane. Les droits de douane réellement perçus, en pourcentage des importations américaines, s’établissent à environ 9 % et non au taux tarifaire effectif de 18 %, un écart qui a atténué le choc. 

Deuxièmement, comme les droits de douane réalisés sont inférieurs aux taux annoncés, l’effet d’entraînement sur l’inflation a également été plus faible. Les entreprises ont absorbé une grande partie des droits de douane dans leurs marges, épargnant aux consommateurs la majeure partie de la hausse des prix (graphique 1).  Si l’on prend une autre observation, les prix à l’importation de certains secteurs fortement taxés ont chuté, ce qui indique habituellement que les exportateurs étrangers assument également une partie des coûts, en particulier pour les véhicules automobiles et les biens de consommation (graphique 2). Les entreprises qui absorbent les hausses de prix pourraient finir par en répercuter une plus grande partie sur les consommateurs, mais cela dépendra en fin de compte de la confiance qu’elles accordent à la capacité des consommateurs à payer des prix plus élevés. À l’heure actuelle, cette confiance semble faible, car une grande partie des plaintes des gens ordinaires porte sur la hausse du coût de la vie. 

Enfin, l’économie mondiale a profité de certains facteurs favorables qui ont contrebalancé cette tendance. Les investissements technologiques dans les logiciels, les ordinateurs et le matériel connexe ont contribué en grande partie à la croissance du produit intérieur brut (PIB) des États-Unis en 2025. La flambée des évaluations boursières et la légère baisse des taux d’intérêt ont favorisé la hausse des investissements des entreprises dans un contexte de course à l’adoption des technologies d’intelligence artificielle (IA). 

Hors des États-Unis, les banques centrales ont davantage abaissé leur taux directeur et les conditions financières ont été favorables. La Chine a été la principale cible des droits de douane les plus élevés, mais a défié les attentes grâce aux effets en cascade des mesures de soutien gouvernementales prises l’année précédente. Nous nous attendons toujours à ce que les droits de douane freinent la croissance en Chine, mais leurs effets se feront sentir de façon plus progressive dans l’économie, en particulier après l’annonce récente d’une trêve tarifaire d’un an avec les États-Unis. 

Q2. Quels ont été les effets de la paralysie de 43 jours du gouvernement fédéral sur l’économie américaine? 

Le graphique 3 montre les prévisions de produit intérieur brut (PIB) réel des États-Unis, sous forme de variation trimestrielle et trimestrielle annualisée en pourcentage, avant et après la paralysie du gouvernement fédéral. Le PIB devrait ralentir à moins de 1 % au quatrième trimestre en raison de cette paralysie, soit environ 1,5 point de pourcentage de moins que la trajectoire observée avant la paralysie. Les données proviennent du Bureau of Economic Analysis.

La paralysie du gouvernement fédéral pendant six semaines posera des problèmes à court terme. Selon les estimations du Congressional Budget Office, le ralentissement économique pourrait réduire de jusqu’à 1,5 point de pourcentage (annualisé) la croissance du quatrième trimestre, soit une baisse de 112 milliards de dollars de la production. La majeure partie de cette baisse est attribuable aux 650 000 travailleurs en congé forcé qui n’ont pas été payés pendant la paralysie, ce qui a réduit les dépenses de consommation discrétionnaires. Mais il s’agit également des achats de biens et de services auxquels le gouvernement a renoncé, ainsi que les répercussions sur les investissements privés des retards de paiement, de permis et d’inspections du gouvernement. 

Heureusement, en vertu de la proposition de loi de financement signée le 12 novembre, tous les employés seront payés rétroactivement et une rémunération complémentaire complète sera versée à tous les employés mis à pied provisoirement, ce qui devrait inverser la plupart des effets sur les dépenses à court terme jusqu’à la fin du premier semestre de 2026 (graphique 3). Pour autant, ces travailleurs ne peuvent pas retourner dans le passé pour se faire couper les cheveux ou manger au restaurant avec leur famille. D’ici la fin de l’année prochaine, le niveau du produit intérieur brut (PIB) devrait rester inférieur de 40 milliards de dollars à l’hypothèse contre-factuelle, ce qui souligne le « coût » de la paralysie. 

Avant la paralysie du gouvernement, l’économie américaine commençait à se redresser après un début d’année décevant. Les révisions du PIB du deuxième trimestre ont montré que les dépenses de consommation étaient beaucoup plus élevées que ce que les données précédentes indiquaient, tandis que les grands investissements dans l’intelligence artificielle (IA) soutenaient les investissements globaux des entreprises. Fait important, les dépenses de consommation de juillet et d’août ont été également solides, ce qui donne à penser que l’élan du deuxième trimestre s’est poursuivi au troisième trimestre. Toutefois, la vigueur des dépenses a été en contradiction avec le ralentissement du marché de l’emploi (voir la question 4). Comme les embauches ont tendance à orienter la consommation des ménages, un certain ralentissement était attendu avant même le début de la paralysie du gouvernement. Et maintenant, ces effets seront plus prononcés. Cela signifie que nos prévisions d’une solide progression de plus de 3 % du PIB au troisième trimestre seront probablement suivies d’un rythme inférieur à 1 % au quatrième trimestre. Au-delà de la volatilité, 2025 devrait afficher un rythme de 2 %, un chiffre assez remarquable compte tenu de l’ampleur de l’incertitude tout au long de l’année et du niveau restrictif du taux directeur par rapport aux pays comparables.  

Les perspectives pour 2026 pourraient ne s’améliorer que légèrement, car il est peu probable que les investissements extraordinaires dans l’IA réitèrent leur contribution massive à la croissance. Côté positif, les consommateurs et les entreprises devraient profiter de l’éclaircissement du contexte commercial, d’une modeste poussée budgétaire grâce à la loi One Big Beautiful Bill Act, et d’une nouvelle baisse des taux d’intérêt.

Q3. Faut-il s’inquiéter du ralentissement du marché de l’emploi aux États-Unis?

La croissance de l’emploi a nettement ralenti cette année, et la tendance s’est encore compliquée avec la paralysie du gouvernement fédéral. Les derniers chiffres sur l’emploi ne couvrent que la période allant jusqu’à septembre, mais ils montrent une hausse de la création d’emplois à son rythme le plus rapide en cinq mois. Toutefois, les gains d’emploi restent étroitement concentrés, tandis que les secteurs exposés au commerce connaissent des difficultés croissantes. 

Pour ce qui est des autres statistiques, les demandes initiales de prestations d’assurance-chômage jusqu’à la mi-novembre se sont cantonnées dans une fourchette étroite, à un faible niveau. Toutefois, les diverses sources de données non gouvernementales ont transmis des signaux contradictoires. Les offres d’emploi déclarées par Indeed confirment le ralentissement de la demande, tout comme les sous-composantes de l’emploi de l’indice ISM des directeurs d’achat des secteurs manufacturier et non manufacturier.  Le rapport Challenger a également révélé une hausse des licenciements en octobre, conduisant les observateurs à s’inquiéter de ce que pourraient révéler les données officielles qui seront publiées en décembre. 

Le graphique 4 présente les primes de compensation de l’inflation sur les taux des titres du Trésor à 2, 5 et 10 ans. Au cours des derniers mois, le taux d’inflation neutre à court terme (2 ans) a convergé vers les mesures à long terme (5 et 10 ans), ce qui donne à penser que les attentes d’inflation restent bien ancrées. Les données proviennent de la Réserve fédérale américaine.

À l’inverse, le rapport sur les emplois dans le secteur privé d’ADP racontait une tout autre histoire. Ils ont rebondi de 42 000 en octobre, après un recul de 29 000 le mois précédent (graphique 4). Étant donné que ce dernier chiffre ne reflétait pas les données sur l’emploi en septembre, mois où le secteur privé a créé quelque 97 000 postes, l’exactitude des prévisions de ce rapport d’un mois à l’autre peut poser question. 

En fin de compte, on peut dire que les données ne sont ni clairement décevantes, ni clairement encourageantes, et qu’elles se situent plutôt dans un entre-deux – jusqu’à ce que le taux de chômage entre en jeu.  

En effet, même s’il reste faible, le taux de chômage tend à remonter, avec une progression de 0,3 point de pourcentage depuis juin. Cette hausse aurait été plus rapide sans la baisse de la population active, puisque le nombre de nouveaux travailleurs arrivant sur le marché du travail chaque mois a baissé. Il faut donc moins de nouveaux emplois pour maintenir le taux de chômage à un niveau stable. Nous estimons qu’une croissance d’environ 45 000 emplois par mois devrait suffire pour maintenir le taux de chômage actuel pour cette année, et qu’il pourrait suffire, l’an prochain, de 30 000 nouveaux emplois par mois alors que l’immigration continuera de ralentir. 

Cela signifie qu’avec notre prévision d’une amélioration progressive de l’emploi en 2026, le taux de chômage sera, de fait, plafonné. Selon nous, une moyenne mensuelle de 85 000 emplois l’an prochain devrait limiter le taux de chômage à son sommet actuel de 4,4 %, avant de terminer l’année plus près de 4,1 %. Toutefois, ce cycle économique s’accompagne d’une incertitude plus élevée concernant la demande et l’offre de main-d’œuvre. Côté offre, les politiques d’immigration sont au cœur de cette incertitude, tandis que plusieurs facteurs exceptionnels exercent des pressions à la baisse sur la demande de main-d’œuvre, qu’il s’agisse des réductions des dépenses fédérales, des pressions croissantes sur les coûts découlant des droits de douane ou de l’accélération de la mise en œuvre de l’intelligence artificielle (IA).

Le graphique 4 présente les variations de l’emploi aux États-Unis selon une moyenne sur trois mois fondée sur le rapport sur l’emploi et le rapport d’ADP. Les deux enquêtes montrent une tendance semblable et révèlent un ralentissement important de la croissance de l’emploi depuis le début de l’année. 

Q4. La Réserve fédérale américaine (la Fed) fera-t-elle une pause alors que l’inflation persiste et les données manquent? 

Le graphique 5 montre l’indice d’abordabilité du logement au fil du temps, notamment une partie avec les prévisions de base et un autre scénario où les taux hypothécaires baissent plus fortement. Le graphique montre que, dans le scénario de base, l’indice d’abordabilité du logement s’améliore, mais reste inférieur à sa moyenne à long terme. Dans le scénario alternatif, où le taux tombe à 4,7 %, mais où toutes les autres hypothèses restent les mêmes, l’indice se redresse pour approcher sa moyenne à long terme.

À l’heure actuelle, c’est très probable. À en croire les contrats à terme sur fonds fédéraux, seulement environ le tiers du marché anticipe une autre baisse de taux en décembre, une situation très différente de ce qu’elle était il y a encore quelques semaines, lorsque les marchés envisageaient une autre baisse avec une quasi-certitude. Qu’est-ce qui a changé? Plusieurs éléments ont changé, mais surtout, le Bureau of Labor Statistics a annoncé qu’il ne publierait pas de rapports sur l’emploi et l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) en octobre, et les données de novembre ne seront publiées qu’après la prochaine réunion du Federal Open Market Committee (FOMC), le 10 décembre. Mais même avant cela, il y avait des preuves qu’un nombre croissant de dirigeants de la Fed étaient en faveur d’une pause en raison du manque de données. Et le sentiment a été renforcé par le procès-verbal de la réunion d’octobre du FOMC, qui a montré que, bien que la plupart des participants aient estimé qu’il serait nécessaire à un moment donné de procéder à d’autres baisses, bon nombre d’entre eux ont jugé qu’il n’y avait pas lieu d’assouplir en décembre. 

Le président Powell semble adhérer à ce point de vue, soulignant lors de la dernière conférence de presse que « lorsque l’on conduit par temps de brouillard, on ralentit ». De ce point de vue, le FOMC devrait faire sauter sa réunion de décembre, ce qui lui donnera un peu plus de temps pour se mettre à jour sur les données économiques, puis procéder à une réduction en janvier si les chiffres sur l’emploi venaient confirmer la tendance au ralentissement. Pour autant, rien ne garantit que ce sera le cas. Si le marché de l’emploi montre des signes de raffermissement ou même de stabilisation, la Fed pourrait très bien opter pour une prolongation de sa pause, tout en continuant de privilégier l’assouplissement.  Selon nous, le principal argument en faveur d’au moins une autre baisse au début de 2026 est que le taux directeur demeure supérieur à la posture neutre, qui est estimée à 3,0 % selon la médiane des dirigeants de la Fed. Cela nous amène à penser qu’il y a peu de risque qu’une nouvelle baisse préventive intervienne sans alimenter davantage l’inflation. Le calcul serait différent si les attentes d’inflation perdaient leur ancrage, mais ce n’est pas le cas. Les taux d’inflation neutres à court terme ont diminué au cours des derniers mois et convergent vers les mesures plus stables sur 5 et 10 ans (graphique 5). 

Si la Fed baisse son taux en janvier, il est probable qu’elle fasse une pause pour les deux réunions qui suivront. À 3,75 %, le taux directeur se situerait dans la partie supérieure de la fourchette des estimations neutres, créant un point d’arrêt naturel pour marquer une pause et évaluer les effets cumulatifs des trois réductions précédentes. Pourvu que l’inflation s’inscrive à la baisse au deuxième trimestre de 2026, la Fed pourrait ramener le taux directeur à 3,25 % d’ici le troisième trimestre de l’année prochaine. 

Q5. Que faut-il pour soulager le marché de l’habitation américain? 

es taux hypothécaires ont diminué par rapport aux sommets de 2023 et oscillent maintenant autour de 6,3 % pour un prêt à taux fixe de 30 ans. Cette baisse n’a apporté qu’un modeste répit au coût des logements, et les ventes de propriété restent à un creux historique. L’offre de logements sur le marché de la revente représente également un obstacle. Les taux pourraient encore diminuer à mesure que la Réserve fédérale américaine (la Fed) poursuit son assouplissement, mais nous nous attendons à ce que la baisse des taux hypothécaires se limite à une fourchette de 5,75 % à 6,00 % d’ici le milieu de 2026. Cette baisse devrait permettre d’améliorer quelque peu l’activité de vente, mais également de réduire les coûts de financement d’une propriété et combler l’écart entre le taux d’intérêt moyen des prêts hypothécaires existants (environ 4,10 %) et le taux en vigueur pour les nouveaux acheteurs (graphique 6). Cet écart constitue un obstacle important pour les propriétaires actuels qui devront négocier un taux hypothécaire plus élevé pour financer un nouvel achat.  

Selon les données réunies par la Réserve fédérale de New York, seulement 15 % des détenteurs de prêts hypothécaires ont un taux hypothécaire supérieur à 6 %, tandis que 10 % ont un taux entre 5 % et 6 %. Le rétrécissement de l’écart libère de cet effet d’immobilisation des prêts hypothécaires et peut par conséquent stimuler l’offre sur le marché. 

Nous prévoyons que les ventes totales de propriétés augmenteront de 5 % en 2026 et de 10 % en 2027, ce qui resterait tout de même inférieur d’environ 5 % aux niveaux d’avant la pandémie – un signe que la reprise est très progressive en l’absence de très nette baisse des taux. Pour que l’abordabilité des logements revienne à sa moyenne à long terme, nous estimons que les taux hypothécaires devraient baisser plus fortement pour s’établir à environ 4,7 %, toutes choses étant égales par ailleurs (graphique 7).

Le graphique 6 présente le taux hypothécaire effectif payé par les propriétaires américains et le taux hypothécaire actuel disponible sur 30 ans pour les nouveaux acheteurs. Le taux effectif des prêts hypothécaires en cours s’établissait à environ 4,1 % au troisième trimestre, ce qui est nettement inférieur au taux de 6,6 % offert aux nouveaux acheteurs au cours de la même période. Bien que l’écart entre les deux ait diminué au cours des derniers trimestres, il reste élevé, s’établissant à plus de 200 points de base. Le graphique 7 présente le déficit du gouvernement fédéral prévu dans le plus récent budget. Il compare les chiffres du déficit à ceux de l’Énoncé économique de l’automne de 2024. Le graphique montre que le déficit budgétaire devrait être plus important dans les cinq prochaines années qu’annoncé dans l’Énoncé économique.

Deux politiques émergentes de l’administration Trump pourraient faire remonter nos prévisions en matière de ventes et de prix. La première est l’idée de prêts hypothécaires transférables d’une propriété à une autre, qui permettent aux emprunteurs de transférer leur prêt et leur taux actuels à une nouvelle propriété. Ainsi, l’effet d’immobilisation serait atténué. La deuxième proposition consiste en un prêt hypothécaire de 50 ans, qui pourrait réduire le paiement hypothécaire moyen d’une propriété de prix médian d’environ 150 $ par mois en moyenne, et jusqu’à 250 $ par mois pour les propriétés dans la limite supérieure de la fourchette. Cette fourchette reflète l’incertitude quant à la façon dont ce produit hypothécaire – qui serait presque certainement assorti d’un taux d’intérêt plus élevé que le taux fixe à 30 ans – serait finalement tarifié. Pour autant, prolonger la période d’amortissement fait également presque doubler le total des intérêts payés sur la durée du prêt, s’il est conservé jusqu’à son échéance, ce qui peut limiter son attrait. Quoi qu’il en soit, les deux mesures politiques nécessitent du temps pour opérer les changements législatifs nécessaires et les mettre en œuvre (probablement au moins un an environ), de sorte que leur effet potentiel est plutôt éloigné dans le temps.   

Q6. Le budget fédéral du Canada amènera-t-il des « changements transformationnels »? 

Le graphique 8 présente la part des importations américaines en provenance du Canada explicitement importées en vertu de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM). Le graphique montre que cette part a augmenté pour atteindre 85 % en juillet.

Apparu à première vue comme un « premier pas » solide, le budget n’a pas présenté d’annonces vraiment sérieuses en faveur d’une transformation économique. Signalons tout d’abord que les efforts déployés pour passer des dépenses d’exploitation à des dépenses en immobilisations sont louables. D’importantes dépenses dans le logement, les infrastructures publiques et la défense sont inscrites au budget (graphique 8). Si les fonds sont dépensés comme prévu, et s’ils attirent des sommes encore plus importantes du secteur privé et d’autres niveaux de gouvernement, la croissance serait nettement stimulée. Toutefois, la taille et la complexité des projets nécessiteront du temps et de la patience, et le gouvernement a finalement opté pour une expansion budgétaire limitée. Par rapport aux hypothèses budgétaires déjà intégrées à nos prévisions de septembre, ce budget n’augmentera pas de façon notable la croissance. À l’époque, nous envisagions que les dépenses publiques représenteraient environ 1 % du produit intérieur brut (PIB) l’an prochain, et nous restons fidèles à nos prévisions tant qu’il n’y aura pas de preuves solides d’un décollage des grandes initiatives gouvernementales. Nous maintenons que l’économie canadienne devrait s’améliorer légèrement d’un quatrième trimestre à l’autre par rapport à sa croissance inférieure à 1 % cette année, pour s’établir à 1,6 % en 2026. Toutefois, il s’agit d’un rythme historiquement modeste qui témoigne des défis propres à notre époque. 

Le budget ne contenait pas, ni ne prévoyait, d’examen complet des impôts ou des dépenses et des transferts. Comme nous l’avons déjà écrit, le contexte fiscal et réglementaire actuel n’est pas favorable à la croissance de la productivité (voir notre rapport). Le projet de loi à venir visant à prolonger l’initiative d’amortissement accéléré des dépenses en capital (étendue et rebaptisée superdéduction à la productivité) abaisse certes le taux effectif marginal d’imposition des entreprises, mais il ne constitue pas une révision globale. 

Bien sûr, la forte incertitude du contexte d’exploitation dans lequel le Canada et ses entreprises évoluent plane sur toutes les décisions d’investissement. Même avec les allègements fiscaux (pour les investissements marginaux ou par l’intermédiaire du taux légal), le manque de clarté concernant l’accès futur au marché américain limite l’efficacité des mesures fiscales prévues dans le budget. Ainsi, on peut arguer qu’il faudra des mesures plus audacieuses pour établir une nouvelle position concurrentielle à l’échelle mondiale.  

Côté réglementaire, le gouvernement compte sur le Bureau des grands projets pour accélérer le processus d’approbation des grands projets d’infrastructures, d’exploitation minière et d’énergie. L’économie canadienne n’est pas étrangère au durcissement des exigences réglementaires. Cet été, le gouvernement a annoncé un examen de la réglementation de 60 jours, avec l’intention de déposer un projet de loi de simplification et de modernisation des obstacles inutiles. Mais les résultats de ces efforts ne seront connus que l’an prochain, au mieux. Le Bureau des grands projets est une nouvelle entité. Il faudra donc un temps d’observation pour vérifier son efficacité, notamment pour déterminer si les investisseurs sont prêts à affecter d’importantes sommes d’argent et du temps pour des projets qui nécessiteront encore plusieurs autres étapes pour les mener à bien : divers degrés d’études techniques et de viabilité économique, obtention de financement, construction d’infrastructures de soutien et période d’accélération de la production.  

De plus, les investisseurs et les décideurs doivent tenir compte du nouveau paradigme économique. Peu importe l’accord commercial qui sera conclu avec les États-Unis, les entreprises canadiennes auront moins accès, ou un accès plus coûteux, aux États-Unis qu’auparavant. Donc, même si le budget oriente l’environnement concurrentiel dans la bonne direction, il n’en fait pas assez pour amorcer un changement transformationnel.  

Q7. Quelles sont les perspectives à l’égard des relations commerciales entre le Canada et les États-Unis?

Le graphique 9 présente nos prévisions de la population nationale canadienne révisées à la suite de la publication du Plan des niveaux d’immigration. Nous avons abaissé nos prévisions démographiques de 0,2 % à 0,1 % pour 2026, de 0,3 % à 0,1 % pour 2027 et de 0,9 % à 0,8 % pour 2028.

Pour l’instant, nous partons du principe que le front des droits de douane américains ne change pas. La politique commerciale des États-Unis est de plus en plus instable. Il y a certes de fortes chances pour que le Canada voie certains droits de douane baisser, mais aussi un risque que l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) soit modifié et impose plus de quotas ou des coûts plus élevés aux entreprises par rapport aux années précédentes. À l’heure actuelle, l’accès des entreprises aux États-Unis sans droits de douane passe par leur conformité à l’ACEUM. Côté canadien, environ 85 % des exportations de juillet (graphique 9) entraient dans ce cadre (et environ 4 % de plus sont entrées en franchise de droits en vertu d’autres exemptions). Malgré tout, les exportations totales vers les États-Unis ont reculé d’environ 9 % sur 12 mois dans un contexte de grande incertitude et de droits de douane extrêmement punitifs dans d’autres secteurs.  

Difficile, dans ces conditions, de prévoir l’avenir. La Cour suprême des États-Unis examine actuellement la légalité du pouvoir du président d’imposer des droits de douane en vertu de l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA). Cette loi a été invoquée pour imposer des droits de douane de 35 % sur la plupart des produits canadiens non visés par l’ACEUM (et de 10 % sur l’énergie).  Cette décision ne concernera pas les droits de douane allant jusqu’à 50 % sur les automobiles, l’acier, l’aluminium et le bois d’œuvre, qui sont assujettis à une autre réglementation. Et quand bien même les droits de douane de l’IEEPA étaient invalidés par les tribunaux, le président se tournerait probablement vers d’autres lois. Il en résultera dans tous les cas un contexte d’exploitation toujours incertain pour les entreprises. 

Et les risques ne s’arrêtent pas là. Le réexamen de l’ACEUM pour l’an prochain est en cours. Les récents accords commerciaux des États-Unis avec d’autres partenaires permettent de s’orienter quelque peu. Ces accords avaient généralement quatre éléments en commun. Premièrement, les droits de douane de base imposés aux pays sont abaissés, passant de niveaux « réciproques » élevés à une fourchette typique de 10 % à 15 %. Deuxièmement, les pays doivent éliminer leurs droits de rétorsion et réduire les autres barrières à l’exportation pour les entreprises américaines. Troisièmement, certains produits énumérés à l’article 232 bénéficient d’allègements dans une certaine mesure. Quatrièmement, les accords commerciaux s’accompagnent d’engagements à investir de fortes sommes en dollars ou de conventions d’achat de produits américains. 

Voilà le contexte dans lequel le Canada doit négocier. Comme rien n’indique dans quelle mesure le Canada pourra s’écarter de ce modèle, nous partons pour l’instant du principe que le statu quo sera maintenu. 

Q8. Quelles sont les répercussions des nouvelles règles d’immigration sur les perspectives du Canada? 

Le graphique 10 compare les prévisions des Services économiques TD concernant la croissance du produit intérieur brut (PIB) réel en 2025, en 2026 et en 2027 aux prévisions de la Banque du Canada tirées du Rapport sur la politique monétaire d’octobre. Les deux anticipent une croissance annuelle moyenne de 1,2 % de l’économie canadienne en 2025. Par contre, en 2026 et en 2027, la Banque du Canada prévoit une croissance de 1,1 % et de 1,6 % respectivement, ce qui est légèrement inférieur aux attentes des Services économiques TD (1,2 % et 1,7 %).

La révision du Plan des niveaux d’immigration décidée par le gouvernement fédéral implique un nouveau ralentissement de la croissance démographique, ce qui nous a conduits à réduire nos prévisions de 0,5 point de pourcentage (pp) cumulé d’ici 2028 (graphique 10), soit une baisse de population de 300 000 habitants par rapport à nos prévisions précédentes. 

Ce changement reflète une nouvelle baisse du nombre de permis de résidence non permanente jusqu’à la fin de 2028, principalement en raison d’une réduction de 50 % des permis d’études. Par contre, les cibles de permis de résidence permanente ont été maintenues à 380 000 entrées en 2026 et en 2027, la cible pour 2027 représentant une hausse de 2 % par rapport au plan de l’an dernier.

Nos recherches récentes montrent que les changements dans la planification démographique l’an dernier ont soulagé quelque peu les infrastructures sociales et économiques du Canada. Dans une certaine mesure, nous nous attendons à ce que la nouvelle réduction du nombre de résidents non permanents continue de faire baisser les loyers demandés pour les logements locatifs et les logements en copropriété à l’échelle nationale. Toutefois, le marché de la propriété devrait peu en bénéficier puisque les nouveaux arrivants temporaires y participent peu. Ce plan confirme également que la croissance de la population active à court terme devrait stagner jusqu’en 2027, ce qui limitera la hausse du taux de chômage au Canada.

Sur le plan macroéconomique, les nouvelles cibles d’immigration nous amènent à revoir très légèrement à la baisse (-0,1 pp) nos estimations de croissance démographique pour l’an prochain et n’affectent pas significativement nos attentes concernant les dépenses des ménages ou la croissance du produit intérieur brut (PIB).  

Q9.  La Banque du Canada en a-t-elle fini avec les baisses du taux directeur? 

Le graphique 11 compare les prévisions des Services économiques TD concernant la croissance du produit intérieur brut (PIB) réel en 2025, en 2026 et en 2027 aux prévisions de la Banque du Canada tirées du Rapport sur la politique monétaire d’octobre. Les deux anticipent une croissance annuelle moyenne de 1,2 % de l’économie canadienne en 2025. Par contre, en 2026 et en 2027, la Banque du Canada prévoit une croissance de 1,1 % et de 1,6 % respectivement, ce qui est légèrement inférieur aux attentes des Services économiques TD (1,2 % et 1,7 %).

Pour l’instant, oui. 

La Banque du Canada (BdC) a déjà procédé à d’importantes réductions du taux directeur au cours des 18 derniers mois, ramenant le taux du financement à un jour de 5,00 % à 2,25 %. Les 100 derniers points de base ont été accordés dans le sillage de la guerre commerciale menée par le président Trump et leurs effets sur l’économie ne font que commencer à se faire sentir. Dans la décision d’octobre, le gouverneur Tiff Macklem s’est montré inhabituellement prescriptif en déclarant que si l’économie progressait conformément aux prévisions de la BdC, soit une croissance d’un peu plus de 1 % en 2026, l’inflation devrait rester proche de 2 %, et il sera inutile de procéder à de nouvelles baisses du taux directeur. 

Pour autant, ces perspectives d’inflation stable méritent d’être examinées de plus près. Pour la BdC, les pressions inflationnistes liées à la hausse des coûts pour les entreprises provoquée par le conflit commercial devraient être compensées par la faiblesse de l’économie intérieure. De plus, les difficultés économiques du Canada ne sont pas seulement cycliques, un contexte dans lequel les réductions de taux figurent généralement parmi les réponses politiques les plus efficaces. En effet, dans le même temps, la capacité de production de l’économie est réduite du fait de la transition structurelle qu’elle traverse (temporairement, espérons-le). Comme l’a souligné le gouverneur Macklem, cela limite la capacité de l’outil peu précis de la politique monétaire, le taux du financement à un jour, à stimuler la demande. La meilleure façon de relever le défi structurel est de prendre des mesures politiques gouvernementales précises pour éliminer les obstacles et libérer le potentiel de l’économie (voir la question 6). 

Les prévisions revues de la BdC se rapprochent désormais de notre opinion de septembre, qui demeure largement inchangée (graphique 11). Compte tenu de la forte incertitude économique, il est difficile d’écarter entièrement une nouvelle baisse du taux directeur, mais il faudrait que l’économie ralentisse encore plus rapidement que les attentes déjà modestes de la BdC. 

Q10. Que nous réserve le marché canadien de l’habitation?

Le graphique 12 présente la croissance annuelle moyenne en pourcentage des ventes de propriétés au Canada de 2023 à 2026, selon les projections de septembre 2025 des Services économiques TD et les prévisions préliminaires faites en novembre 2025 . Dans la projection de septembre, il apparaît que les ventes de propriétés au Canada ont diminué de 11,1 % en 2023 et augmenté de 7,9 % en 2024. Elles devraient reculer de 1 % en 2025 et augmenter de 11 % en 2026. Dans la projection de novembre, il apparaît que les ventes de propriétés au Canada ont diminué de 11,1 % en 2023 et augmenté de 7,9 % en 2024. Elles devraient reculer de 2 % en 2025 et augmenter de 9 % en 2026.

D’avril à juillet, les ventes de propriétés ont lentement redémarré au Canada après quelques mois au plus bas. Depuis, toutefois, les ventes ont connu des hauts et des bas. En parallèle, les prix moyens des propriétés au Canada ont remonté de 5 % d’avril à octobre, soutenus par des conditions serrées dans une grande partie du pays, à l’exception de la Colombie-Britannique et de l’Ontario. 

Il est encore un peu tôt, mais nous estimons que la progression des ventes et des prix des propriétés sera plus faible que prévu au quatrième trimestre. L’incertitude économique pèse un peu plus sur le marché et compense dans une certaine mesure les réductions des frais d’intérêts passées. Ce flottement devrait persister l’an prochain en raison de la renégociation de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM). Nos projections de croissance des ventes et des prix moyens des propriétés au Canada en 2026 ne devraient donc être que très légèrement revues à la baisse pour 2026 (graphique 12). 

Le facteur le plus important est que les changements ne modifient pas l’hypothèse que le marché canadien de l’habitation reste sur la voie d’une reprise progressive, soutenue par la demande accumulée et une stabilisation du marché de l’emploi.  

 

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